« Que votre être intégral — à savoir
votre esprit, votre âme et votre corps —
soit conservé sans reproche pour la
venue du Seigneur Jésus ! »
Saint
Irénée, Contre les hérésies, Livre V, chapitre 6, paragraphe 1
6, 1 Au contraire, Dieu sera glorifié dans l'ouvrage
par lui modelé, lorsqu'il l'aura rendu conforme et semblable à son Fils
(Romains 8, 29 ; Philippiens 3, 21). Car, par les Mains du Père,
c'est-à-dire par le Fils et l'Esprit, c'est
l'homme, et non une partie de l'homme, qui devient à l'image et à la
ressemblance de Dieu. Or l'âme et l'esprit peuvent être une partie de
l'homme, mais nullement l'homme : l'homme parfait, c'est le mélange et l'union
de l'âme qui a reçu l'Esprit du Père et qui a été mélangée à la chair modelée
selon l'image de Dieu. Et c'est pourquoi l'Apôtre dit : « Nous parlons sagesse parmi les parfaits. » (1 Corinthiens 2, 6). Sous
ce nom de « parfaits », il désigne ceux qui ont reçu l'Esprit de Dieu et qui
parlent toutes les langues grâce à cet Esprit, comme lui-même les parlait, et
comme nous entendons aussi nombre de frères dans l'Église, qui possèdent des
charismes prophétiques, parlent toutes sortes de langues grâce à l'Esprit,
manifestent les secrets des hommes pour leur profit et exposent les mystères de
Dieu. Ces hommes-là, l'Apôtre les nomme également « spirituels » : spirituels,
ils le sont par une participation de l'esprit,
mais non par une évacuation et une suppression de la chair. En effet, si
l'on écarte la substance de la chair, c'est-à-dire de l'ouvrage modelé, pour ne
considérer que ce qui est proprement esprit, une telle chose n'est plus l'homme
spirituel, mais l'« esprit de l'homme» ou l'« Esprit de Dieu ». En revanche,
lorsque cet esprit, en se mélangeant à l'âme, s'est uni à l'ouvrage modelé,
grâce à cette effusion de l'Esprit se trouve réalisé l'homme spirituel et
parfait, et c'est celui-là même qui a été fait à l'image et à la ressemblance
de Dieu. Quand au contraire l'esprit
fait défaut à l'âme, un tel homme, restant en toute vérité psychique et
charnel, sera imparfait, possédant bien l'image de Dieu dans l'ouvrage modelé,
mais n'ayant pas reçu la ressemblance par le moyen de l'esprit. De même
donc que cet homme est imparfait, de même aussi, si l'on écarte l'image et si
l'on rejette l'ouvrage modelé, on ne peut plus avoir affaire à l'homme, mais,
ainsi que nous l'avons dit, à une partie de l'homme ou à quelque chose d'autre
que l'homme. Car la chair modelée, à
elle seule, n'est pas l'homme parfait : elle n'est que le corps de l'homme,
donc une partie de l'homme. L'âme, à elle seule, n'est pas davantage l'homme :
elle n'est que l'âme de l'homme, donc une partie de l'homme. L'esprit non plus
n'est pas l'homme : on lui donne le nom d'esprit, non celui d'homme. C'est le
mélange et l'union de toutes ces choses qui constitue l'homme parfait. Et
c'est pourquoi l'Apôtre, s'expliquant lui-même, a clairement défini l'homme
parfait et spirituel, bénéficiaire du salut, lorsqu'il dit dans sa première
épître aux Thessaloniciens : « Que le
Dieu de paix vous sanctifie en sorte que vous soyez pleinement achevés, et que
votre être intégral — à savoir votre esprit, votre âme et votre corps — soit
conservé sans reproche pour l'avènement du Seigneur Jésus. » (1
Thessaloniciens 5, 23). Quel motif avait-il donc de demander pour ces trois choses,
à savoir l'âme, le corps et l'esprit, une intégrale conservation pour
l'avènement du Seigneur, s'il n'avait su que toutes les trois doivent être restaurées et réunies et qu'il n'y a pour
elles qu'un seul et même salut ? C'est pour cela qu'il dit « pleinement
achevés » ceux qui présentent sans reproche ces trois choses au Seigneur. Sont
donc parfaits ceux qui, tout à la fois, possèdent l'Esprit de Dieu demeurant
toujours avec eux et se maintiennent sans reproche quant à leurs âmes et quant
à leurs corps, c'est-à-dire conservent la foi envers Dieu et gardent la justice
envers le prochain.