Elle est vraiment excellente et projette une lumière crue sur la triste réalité du monde occidental.
Je partage entièrement ses idées, qu'il exprime sans complaisance.
Le pontificat de Benoît XVI a été sévèrement critiqué. À en
croire les médias, il se réduirait à une série de scandales. Homophobie,
sexisme, pédophilie: telles seraient les vérités du catholicisme de Benoît XVI.
Aussi, l’Église exprimerait un conservatisme sexuel
rigoriste. Elle serait contre les capotes. C’est vrai. C’est une malheureuse
fermeture. Mais est-ce vraiment l’essentiel de son message? En parler autant
témoigne moins des obsessions de l’Église que de l’obsession sexuelle de notre
époque.
Cette caricature nous éloigne de la réalité. Le bilan du
pontificat de Benoît XVI est tout autre. Il correspond à une prise de
conscience bouleversante de l’Église. Partout en Occident, la foi s’effondre.
Inversement, la foi chrétienne rayonne dans le tiers monde.
Grand intellectuel
Il suffit d’aller lire les textes de Benoît XVI, avant comme
après son accession à la papauté, pour prendre conscience de sa profondeur
intellectuelle et philosophique. Benoît XVI réfléchissait à la crise de notre
civilisation. Il cherchait à en comprendre les racines.
Il avait une obsession: la déconnexion entre la civilisation
européenne et le christianisme. Il parlait de «déchristianisation». Une
civilisation peut-elle survivre sans la foi qui l’a accompagnée d’une manière
ou d’une autre sur deux millénaires?
Benoît XVI se demandait si à travers la détestation du
christianisme, l’Occident ne détestait pas sa propre histoire. Une civilisation
peut-elle abolir sa tradition spirituelle fondatrice sans saccager en même
temps ses assises existentielles?
Car en renonçant au christianisme, les Occidentaux
renoncent-ils seulement à l’idée de Dieu? Ne renoncent-ils pas aussi à une
certaine culture? À une certaine vision de l’être humain? À toute une
philosophie qui se trouve à l’origine de nos sociétés?
Plus encore, en renonçant à la culture chrétienne, notre
société devient incompréhensible. Peut-on comprendre l’architecture de nos
villes sans un minimum de culture chrétienne? Peut-on comprendre l’histoire des
arts? Peut-on même comprendre l’histoire du Québec?
Car la religion n’est pas qu’une affaire de croyance
personnelle. Elle structure une civilisation. Lorsqu’une religion s’effondre,
c’est tout un univers mental qui se fracture et s’égrène. On assiste alors à un
foisonnement de croyances loufoques.
Car ne croyons pas que nos sociétés sont désormais sceptiques.
Faux. Elles croient plutôt à n’importe quoi. Le curé s’est fait remplacer par
le gourou ou le coach de vie. C’est la grande spirituelle au profit des
charlatans.
Éclatement du
christianisme
L’effondrement du christianisme a placé la quête de l’absolu
sous le signe de l’anarchie. La multiplication des sectes trouve en bonne
partie son origine dans l’éclatement du christianisme. Cette crise frappe même
intérieurement l’Église.
Autrement dit, Benoît XVI s’inquiétait de la déculturation
des sociétés occidentales. De leur perte d’identité. De leur déracinement. Du
relativisme généralisé qui s’installe dans un monde qui a remplacé Dieu tout
puissant par le nombril tout puissant. Certains se demandent alors si les
sociétés occidentales ne devraient pas se réapproprier leur tradition
religieuse. Car après l’excitation de la libération, ne risque-t-on pas de
faire l’expérience d’un profond nihilisme? Réapprendre le christianisme, cela
ne veut pas dire recommencer à croire en Dieu. Cela veut dire savoir de quelle
histoire nous sommes issus. Croyants et incroyants, nous partageons une même
histoire: celle de l’Occident. Elle n’est pas honteuse.
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