EPILOGUE
Inconsistance des systèmes hérétiques
Saint
Irénée, Contre les hérésies, livre V, chapitre 15, paragraphe 1,
chapitre
16, paragraphe 2, chapitre 19, paragraphe 1, chapitre 20, paragraphe 2
&
chapitre 36, paragraphe 3.
15, 1 [ …]Ainsi
donc, le Créateur vivifie dès ici-bas nos corps mortels, comme il est
loisible de le voir ; il leur promet, de surcroît, la résurrection et la sortie
hors des sépulcres et des tombeaux, et il leur accordera l'incorruptibilité
— car, est-il dit, «leurs jours seront comme l'arbre de vie» (Isaïe 65,
22)— : dès lors la preuve est faite que le seul Dieu c'est lui, qui fait ces
choses, et que lui-même est le bon Père qui, par pure bonté, accorde la vie aux
êtres qui ne la possèdent pas par eux-mêmes.
[…]
16, 2 La
vérité de tout cela apparut lorsque le Verbe de Dieu se fit homme, se rendant
semblable à l'homme et rendant l'homme semblable à lui, pour que, par la
ressemblance avec le Fils, l'homme devienne précieux aux yeux du Père.
Dans les temps antérieurs, en effet, on disait bien que l'homme avait été fait
à l'image de Dieu, mais cela n'apparaissait pas, car le Verbe était encore
invisible, lui à l'image de qui l'homme avait été fait : c'est d'ailleurs pour
ce motif que la ressemblance s'était facilement perdue. Mais, lorsque le
Verbe de Dieu se fit chair, il confirma l'une et l'autre : il fit
apparaître l'image dans toute sa vérité, en devenant lui-même cela même
qu'était son image, et il rétablit la ressemblance de façon stable, en rendant
l'homme pleinement semblable au Père invisible par le moyen du Verbe dorénavant
visible.
[…]
19, 1 Si
donc le Seigneur est venu d'une manière manifeste dans son propre domaine ;
s'il a été porté par sa propre création, qu'il porte lui-même ; s'il a
récapitulé, par son obéissance sur le bois, la désobéissance qui avait été
perpétrée par le bois ; si cette séduction dont avait été misérablement victime
Eve, vierge en pouvoir de mari, a été dissipée par la bonne nouvelle de vérité
magnifiquement annoncée par l'ange à Marie, elle aussi vierge en pouvoir de
mari — car, de même que celle-là avait été séduite par le discours d'un ange,
de manière à se soustraire à Dieu en transgressant sa parole, de même celle-ci
fut instruite de la bonne nouvelle par le discours d'un ange, de manière à
porter Dieu en obéissant à sa parole ; et, de même que celle-là avait été
séduite de manière à désobéir à Dieu, de même celle-ci se laissa persuader
d'obéir à Dieu, afin que, de la vierge Eve, la Vierge Marie devînt l'avocate;
et, de même que le genre humain avait été assujetti à la mort par une vierge,
il en fut libéré par une Vierge, la désobéissance d'une vierge ayant été
contrebalancée par l'obéissance d'une Vierge — ; si donc, encore une fois, le
péché du premier homme a reçu guérison par la rectitude de conduite du
Premier-né, si la prudence du serpent a été vaincue par la simplicité de la
colombe et si par là ont été brisés ces liens qui nous assujettissaient à la
mort : ils sont stupides, tous les hérétiques, et ignorants de
l'«économie» de Dieu, et bien peu au fait de son œuvre relative à l'homme —
aveugles qu'ils sont à l'égard de la vérité —, lorsqu'ils contredisent
eux-mêmes leur propre salut, les uns en introduisant un autre Père en dehors du
Créateur, les autres en prétendant que le monde et la matière qui le constitue
ont été faits par des Anges […]. D'autres méprisent la venue visible du
Seigneur, n'admettant pas son incarnation. D'autres encore, méconnaissant l'«
économie » de la Vierge, le disent né de Joseph. Certains disent que ni leur
âme ni leur corps ne peuvent recevoir la vie éternelle, mais seulement
leur « homme intérieur », et ils prétendent identifier celui-ci avec
leur intellect, qu'ils jugent seul capable de s'élever jusqu'à la perfection.
D'autres admettent que l'âme soit sauvée, mais nient que le corps puisse
avoir part au salut venant de Dieu. Tout cela, nous l'avons dit dans notre
premier livre, où nous avons fait connaître leurs doctrines à tous, et nous
avons ensuite montré l'inconsistance de celles-ci dans notre second livre.
[…]
20, 1 Ceux
donc qui délaissent le message de l'Église font grief aux presbytres de leur
simplicité, ne voyant pas combien un homme simple, mais religieux, l'emporte
sur un sophiste blasphémateur et impudent. Tels sont bien en effet tous les
hérétiques : s'imaginant trouver quelque chose de supérieur à la vérité en
suivant les doctrines que nous venons de dire, ils s'avancent par des chemins
bigarrés, multiformes et incertains, ayant au sujet des mêmes choses tantôt une
opinion et tantôt une autre ; ils sont comme des aveugles que guideraient des
aveugles et ils tombent à juste titre dans la fosse d'ignorance ouverte sous
leurs pas (Matthieu 15, 14), voués qu'ils sont à toujours chercher et à ne
jamais trouver la vérité (2 Timothée 3, 7). Il faut donc fuir leurs opinions
et nous mettre soigneusement en garde contre elles, afin de ne pas subir de
dommage par leur fait ; en revanche, il faut nous réfugier auprès de
l'Église, nous allaiter de son sein et nous nourrir des Ecritures du
Seigneur. Car l'Église a été plantée comme un paradis dans le monde. « Tu
mangeras donc du fruit de tous les arbres du paradis » (Genèse 2, 16) dit
l'Esprit de Dieu. Ce qui veut dire : Mange de toute Ecriture du Seigneur,
mais ne goûte pas à l'orgueil et n'aie nul contact avec la dissension des
hérétiques. Car eux-mêmes avouent posséder la connaissance du bien et du
mal (Genèse 2, 17), et ils lancent leurs pensées au-dessus du Dieu qui les a
créés. Ils élèvent ainsi leurs pensées au delà de la mesure permise. C'est
pourquoi l'Apôtre dit : « N'ayez pas des pensées plus élevées qu'il ne
convient, mais que vos pensées soient empreintes de modération » (Romains 12, 30), de peur que, goûtant à leur
gnose orgueilleuse, nous ne soyons expulsés du paradis de la vie. Car c'est
en celui-ci que le Seigneur introduit ceux qui obéissent à sa prédication, «
ayant récapitulé en lui-même toutes choses, celles qui sont aux cieux et celles
qui sont sur la terre». (Ephésiens 1, 10) Or celles qui sont aux cieux sont
spirituelles, tandis que celles qui sont sur la terre sont cet ouvrage qu'est
l'homme. Ce sont donc ces choses mêmes qu'il a récapitulées en lui, unissant
l'homme à l'Esprit et faisant habiter l'Esprit dans l'homme, devenant lui-même
la tête de l'Esprit et donnant l'Esprit pour qu'il soit la tête de l'homme
: car c'est par cet Esprit que nous voyons, entendons et parlons.
CONCLUSION
36, 3 Ainsi donc, de façon précise, Jean a
vu par avance la première résurrection (Apocalypse 20, 5-6), qui est celle des
justes, et l'héritage de la terre qui doit se réaliser dans le royaume ; de
leur côté, en plein accord avec Jean, les prophètes avaient déjà prophétisé sur
cette résurrection. C'est exactement cela que le Seigneur a enseigné lui aussi,
quand il a promis de boire le mélange nouveau de la coupe avec ses disciples
dans le royaume (Matthieu 26, 29) , et encore lorsqu'il a dit : « Des jours viennent où les morts qui sont
dans les tombeaux entendront la voix du Fils de l'homme, et ils ressusciteront,
ceux qui auront fait le bien pour une résurrection de vie, et ceux qui auront
fait le mal pour une résurrection de jugement » ( Jean 5, 25, 28-29) : il
dit par là que ceux qui auront fait le bien ressusciteront les premiers pour
aller vers le repos, et qu'ensuite ressusciteront ceux qui doivent être jugés.
C'est ce qu'on trouve déjà dans le livre de la Genèse, d'après lequel la
consommation de ce siècle aura lieu le sixième jour, c'est-à-dire la six
millième année ; puis ce sera le septième jour, jour du repos, au sujet duquel
David dit : « C'est là mon repos, les
justes y entreront » (psaume 131, 14 ; 117, 20) : ce septième
jour est le septième millénaire, celui du royaume des justes, dans lequel ils s'exerceront à l'incorruptibilité,
après qu'aura été renouvelée la création pour ceux qui auront été gardés dans
ce but. C'est ce que confesse l'apôtre Paul, lorsqu'il dit que la création sera
libérée de l'esclavage de la corruption pour avoir part à la
liberté glorieuse des enfants de Dieu. (Romains 8, 19-21)
Et en tout cela et à travers tout cela apparaît un seul et même Dieu Père : c'est lui qui a modelé l'homme et promis aux pères l'héritage de la terre ; c'est lui qui le donnera lors de la résurrection des justes et réalisera ses promesses dans le royaume de son Fils ; c'est lui enfin qui accordera, selon sa paternité, ces biens que l'œil n'a pas vus, que l'oreille n'a pas entendus et qui ne sont pas montés au cœur de l'homme (1 Corinthiens 2, 9). Il n'y a en effet qu'un seul Fils, qui a accompli la volonté du Père, et qu'un seul genre humain, en lequel s'accomplissent les mystères de Dieu. Ces mystères, «les anges aspirent à les contempler»(1 Pierre 1, 12) mais ils ne peuvent scruter la Sagesse de Dieu, par l'action de laquelle l'ouvrage par lui modelé est rendu conforme et concorporel au Fils (Romains 8, 29 et Ephésiens 3, 6) : car Dieu a voulu que sa Progéniture, le Verbe premier-né, descende vers la créature, c'est-à-dire vers l'ouvrage modelé, et soit saisie par elle, et que la créature à son tour saisisse le Verbe et monte vers lui, dépassant ainsi les anges et devenant à l'image et à la ressemblance de Dieu.
FINIS UNIVERSI OPERIS
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