dimanche 29 avril 2012

Message électoral de l'apôtre Pierre


En ce temps où les Français s'agitent avec fièvre afin de se choisir un chef de l'Etat, il est spirituellement profitable de ne pas se laisser emporter par le flot tumultueux des passions humaines et d'écouter les conseils de la tradition apostolique. Voici ceux de l'apôtre Pierre (1 Pierre 2, 11-21)

Bien-aimés, je vous exhorte, comme étrangers et voyageurs sur la terre, à vous abstenir des convoitises charnelles qui font la guerre à l'âme.

Ayez au milieu des païens une bonne conduite, afin que, là même où ils vous calomnient comme si vous étiez des malfaiteurs, ils remarquent vos bonnes œuvres, et glorifient Dieu, au jour où il les visitera.

Soyez soumis, à cause du Seigneur, à toute autorité établie parmi les hommes, soit au roi comme souverain, soit aux gouverneurs comme envoyés par lui pour punir les malfaiteurs et pour approuver les gens de bien.

Car c'est la volonté de Dieu qu'en pratiquant le bien vous réduisiez au silence les hommes ignorants et insensés, étant libres, sans faire de la liberté un voile qui couvre la méchanceté, mais agissant comme des serviteurs de Dieu.

Honorez tout le monde; aimez les frères; craignez Dieu; honorez le roi.

Serviteurs, soyez soumis en toute crainte à vos maîtres, non seulement à ceux qui sont bons et doux, mais aussi à ceux qui sont d'un caractère difficile.

Car c'est une grâce que de supporter des afflictions par motif de conscience envers Dieu, quand on souffre injustement.

En effet, quelle gloire y a-t-il à supporter de mauvais traitements pour avoir commis des fautes? Mais si vous supportez la souffrance lorsque vous faites ce qui est bien, c'est une grâce devant Dieu.

Et c'est à cela que vous avez été appelés, parce que Christ aussi a souffert pour vous, vous laissant un exemple, afin que vous suiviez ses traces,

mercredi 25 avril 2012

Christianophobie 3/3 (suite et fin) Quel est le sens de la vie ?


-         Monseigneur, vous avez évoqué le sens de la vie. Existe-t-il un sens universel de la vie que vous pourriez révéler à toute personne qui viendrait vous poser cette question ?
-         Formuler un sens universel de la vie serait très complexe, et si c’était possible, ce serait déjà fait. Mais je pense que pour nous, chrétiens, il n’y a rien de plus grand que le sens qu’a formulé Jésus Christ et l’objectif qu’il nous laisse : chercher d’abord le Royaume des cieux, toute chose vous sera donnée par surcroît.
Il n’est pas facile d’expliquer à tout le monde aujourd’hui ce qu’est le Royaume de Dieu. D’habitude, les gens, même les croyants, se représentent le Royaume de Dieu comme ce qui nous attend après la mort et qui ne concerne donc pas directement notre vie. Pourtant, les chrétiens pratiquants peuvent témoigner de ce que le Royaume de Dieu peut être présent dès notre vie terrestre, si toutefois nous le désirons.
A l’église, nous touchons au Royaume des cieux qui devient une réalité de notre vie par l’expérience de la prière, par notre participation aux sacrements et avant tout par le sacrement de l’Eucharistie (la Communion), dans lequel nous ne communiquons pas seulement avec Dieu, mais nous nous unissons à lui spirituellement, moralement et physiquement.
Cette présence du Royaume de Dieu que nous ressentons pleinement à l’église peut et doit pénétrer toute notre vie. Si nous plaçons cette expérience de communion au Royaume des cieux à la première place, tout le reste se construit autour et vient s’y surajouter. Je peux en témoigner de par mon expérience personnelle. Mais je peux en témoigner aussi de par l’expérience de très nombreuses personnes de mon entourage, mes amis, mes paroissiens, ma mère. Sans parler des gens des générations précédentes qui, bien plus que nous, ont su incarner ce commandement dans leur vie.
-         Comment ce commandement d’aspirer au Royaume de Dieu s’exprime-t-il dans le comportement du croyant, en dehors du fait qu’il va à l’église ? Et que ressent-il ? Amour de Dieu, amour du prochain, de la vie, ou quelque chose d’autre ?
-         Là encore, il n’y a pas de modèle de comportement que l’on pourrait prescrire pour mettre ce commandement en pratique. Chacun trouve sa manière d’incarner ce commandement dans sa propre vie s’il veut vraiment le suivre.
On attribue à saint Augustin cette remarquable sentence : « Aime Dieu et fais ce que tu veux ». Cela veut dire que si quelqu’un aime vraiment Dieu, il n’a pas besoin des autres commandements, car il les observera de toutes façons, parce qu’il aime Dieu. S’il aime Dieu, il aimera son prochain. S’il aime Dieu, il ne commettra pas de péchés mortels, ne se permettra aucune mauvaise pensée, etc.
Si quelqu’un met le Royaume de Dieu et les idéaux spirituels à la première place, tout le reste lui sera donné par surcroît. La quête du Royaume de Dieu et de sa justice, que nous a enseignée le Seigneur Jésus Christ devient le leitmotiv de sa vie, non seulement de sa vie religieuse, mais aussi de sa vie privée, de sa vie familiale, de sa vie personnelle.
Comment cela se manifeste-t-il concrètement ? S’il s’agit d’un chrétien orthodoxe, il fondera une famille unie, aimera sa femme et ses enfants, il aura autant d’enfants que le Seigneur lui en aura donné. Il sera le défenseur et le nourricier de sa famille. Dans le domaine professionnel, il se laissera également guider par les normes morales chrétiennes : s’il est entrepreneur, il ne volera pas, refusera toute corruption, ne se permettra aucune action amorale au nom de son profit personnel, portera sa croix de baptême, même si cela est contraire au code vestimentaire.
Je ne dis pas s’il faut porter la croix sous son vêtement ou par-dessus, c’est secondaire. Je dis que l’homme doit avoir le droit de se laisser guider par les normes spirituelles et morales chrétiennes dans tous les domaines de la vie.


mardi 17 avril 2012

Christianophobie (suite) 2/3 Le nouveau fim de Pavel Lounguine


-         Dans un contexte de tension entre l’idéologie libérale et la vision religieuse du monde, le projet que vous avez réalisé en commun avec le réalisateur Pavel Lounguine – le film « le Chef d’orchestre » – revêt une importance particulière. Comment est venu l’idée de ce film, quels étaient vos objectifs ?
-         J’ai fait la connaissance de Pavel Lounguine il y a cinq ou six ans, peu après la sortie de son film « L’Île », qui m’avait fait très bonne impression, et peu après que j’ai écrit mon oratorio « La passion selon saint Mathieu ». Je lui ai offert un disque avec un enregistrement vidéo de la première, qui avait eu lieu en présence du Patriarche Alexis II, de bienheureuse mémoire, et du Primat actuel de l’Église orthodoxe russe, le Patriarche Cyrille (à l’époque Président du Département des relations extérieures) ; Vladimir Fedosseev était à la direction. Lounguine a apprécié cette musique et nous avons discuté d’un éventuel accompagnement vidéo permettant d’en accentuer l’effet.
Mes idées étaient assez simples, je pensais illustrer la musique de fresques antiques, disons byzantines, macédoniennes, serbes, avec des représentations des scènes de l’histoire de la passion du Christ dont parle l’Évangile et qui sont mises en musique dans l’oratorio. Lounguine m’a tout de suite signifié que cela ne l’intéressait pas, qu’il ne faisait pas de documentaires, mais seulement du cinéma de fiction et il m’a proposé d’unir musique et jeu d’acteurs. Ensuite, il s’est mis à travailler au scénario. Cela a pris un certain temps, puisqu’entre temps je suis devenu président du Département des relations ecclésiastiques extérieures et métropolite. Je sais qu’il a écrit plusieurs versions avant d’obtenir un scénario satisfaisant.
Je n’ai pas participé au tournage. Je n’ai assisté qu’au tournage d’un seul épisode, celui où le chef d’orchestre monte sur scène, où l’orchestre se met à jouer ma musique.
Au final, nous sommes parvenus à mon avis à un produit réussi d’alliance artistique.  La musique n’est pas une simple bande originale, elle est un des principaux personnages du film. Bien plus, certains épisodes s’inscrivent entièrement dans des numéros de l’oratorio « la passion selon saint Mathieu ».
-         Que peut offrir à nos contemporains l’alliance de la musique sacrée et de l’art cinématographique ? Peut-elle vraiment les rapprocher de Dieu, les rendre meilleurs, plus droits, plus profonds ?
-         Je pense que ce genre de film est important : ils obligent le spectateur à réfléchir au sens de la vie et à la responsabilité de ses actes, sans proclamer directement des idées ou des valeurs religieuses.
Ce film ne contient aucune morale religieuse à proprement parler. C’est-à-dire qu’il ne se termine pas, par exemple, sur l’image du chef d’orchestre allant à confesse et recevant le pardon de ses fautes ; on ne voit pas non plus les héros du film se précipiter tous ensemble à l’église pour y communier.
Lounguine est un réalisateur qui, comme il le dit lui-même, aime travailler en demi-teintes ; il n’aime pas mener les sujets à leur fin logique. Et ici non plus, aucun sujet n’est terminé. Nous devenons en quelque sorte les participants d’un drame qui se développe sur plusieurs jours, mais nous ne savons pas ce qui l’a précédé, ni ce qui viendra après.
Pourtant, ce film parle de thèmes très importants, de thèmes éternels comme les rapports entre parents et enfants, entre mari et femme. Et ce film nous montre que certains de nos actes sont parfois irréparables. Par exemple, les relations de ce chef d’orchestre et de son fils qu’il ne comprenait pas, qu’il ignorait. Et sa relation ne change que lorsque l’irréparable est survenu, son fils est mort.
-         Une parabole déçue du fils prodigue ?
-          Oui, c’est pourquoi je pense que ce film est important, dans le sens où il montre la vie quotidienne de gens ordinaires, une vie dans laquelle le malheur fait irruption, dans laquelle font irruption des problèmes, une vie dans laquelle la musique fait irruption. Et cette musique donne à l’intrigue un nouveau sens.
-         Peut-on dire que les héros du film vivent des moments forts, des passions, des douleurs, des peurs, des malheurs, des doutes que l’on pourrait comparer avec les souffrances du Christ, et que cela doit indiquer au spectateur qui réfléchit le chemin de l’église ?
-         Un des scénarios proposait de faire dépendre l’intrigue du sujet de la passion du Christ, autrement dit, de développer dans le film deux sujets parallèles. Finalement, la passion du Christ en tant que sujet n’est pas représentée dans le film, dont toute la durée est occupée par le déroulement de l’intrigue.
Malgré tout, il me semble que l’histoire de la passion du Christ se laisse deviner en filigrane, même si elle n’apparaît pas directement. Elle transparaît dans la musique, dans les fragments du récit évangélique qui y sont lus. Elle se laisse deviner dans le parallèle du drame humain qui se déroule sous nos yeux dans le film avec Jérusalem où, il y a deux mille ans, s’est déroulé un autre drame humain. Finalement, tous ces drames ramènent au thème de la relation de l’homme avec Dieu.

jeudi 12 avril 2012

Avec la christianophobie, l'Occident se suicide (1/3)


Le métropolite Hilarion de Volokolamsk, Président du Département des relations ecclésiastiques extérieures parle des causes et des possibles conséquences de la montée de la christianophobie en Europe, de la tendance au rejet de la morale traditionnelle, de l’identité de la Russie, du film Le Chef d’orchestre et du sens de la vie dans une interview recueillie par Olga Lipitch, de l’agence « RIA Novosti » tandis que l’Église traverse une période difficile.

    
 L’interdiction de porter une croix sur son lieu de travail en Grande-Bretagne est perçue par de nombreux chrétiens comme un exemple témoignage criant de la montée de la christianophobie en Europe ces dernières années. Les citoyens britanniques licenciés pour port de symbole religieux ont porté plainte devant le Tribunal de Strabsourg. Où en est-on actuellement et que pensez-vous de cette situation ?
-         La position du gouvernement britannique, qui consiste à justifier l’interdiction de porter une croix sur son lieu de travail, est exposée dans un document adressé à la Cour européenne des droits de l’homme. Ce document a été rédigé en réponse à la plainte de plusieurs citoyens britanniques auxquels le port de la port a été refusé à différentes périodes. Cela concerne en premier lieu la fameuse Nadia Eveida, dont le cas a connu une certaine résonance : il y a quelques années, elle a perdu son emploi au sein de la compagnie aérienne « British Airways » pour avoir refusé de retirer la croix de baptême qu’elle portait sur son uniforme. Puis une infirmière, Shirley Chaplin, qui a été licenciée après 30 années de service hospitalier pour port de la croix. Et plusieurs autres fonctionnaires ayant refusé d’enregistrer des unions homosexuelles à titre de mariage.
Ce document, dont nous ignorons le contenu, évoque, si l’on en croit les médias, le droit des employeurs à interdire le port de la croix. Les juristes anglais défendent leur position en citant un certain nombre de points du droit en usage en Grande-Bretagne, ainsi que des arguments religieux, comme quoi, par exemple, le port de la croix ne serait pas obligatoire pour les chrétiens.
L’archevêque de Canterbury, R. Williams s’est impliqué dans le débat en disant que la croix était devenue pour beaucoup aujourd’hui un simple bijou. Lord Carey, son prédécesseur, a exprimé son désaccord avec cette position.
Dans l’ensemble, la question fait aujourd’hui débat en Grande-Bretagne. Mais l’essentiel, à mon avis, est la question telle qu’elle se pose : l’employeur peut interdire le port de symboles religieux à ses employés, en particulier le port de la croix. Je pense qu’elle témoigne du sérieux déclin moral et du rejet conscient des racines chrétiennes de la Grande-Bretagne au sein de la classe politique anglaise.
A mon avis, le seul parallèle que l’on peut établir, et qui vient tout naturellement à l’esprit, est la situation de l’Union Soviétique où le port de la croix était interdit, où on arrachait la croix si on la remarquait. Lorsque j’allais à l’école, je portais une croix et je me souviens que l’institutrice, ayant remarqué la chaînette, l’a tirée et arrachée… Si l’Angleterre se met à ressembler à l’Union soviétique en établissant le diktat du sécularisme militant, on ne peut pas dire que ce soit la comparaison la plus avantageuse pour un pays qui se dit démocratique.

A votre avis, pourquoi enregistre-t-on de plus en plus de cas semblables ces dernières années ?
-         Il me semble que dans beaucoup de pays occidentaux, et en Grande-Bretagne en particulier, s’est développée une manie du politiquement correct qui s’aggrave à la vitesse d’une psychose maniaco-dépressive. Le politiquement correct consiste à dire : pour rien au monde, nous chrétiens, ou nous, citoyens d’un pays occidental, ne devons vexer les musulmans, les juifs, les hindous ou les représentants de toute autre religion. Et pour ne pas provoquer de conflits religieux, on propose la solution suivante : écartons la religion de la sphère publique, éliminons les symboles religieux de la vie sociale ; alors la paix et l’amour entre les confessions régneront soit-disant.
Nous savons pourtant bien que les symboles religieux d’une confession, dans la majorité des cas, n’offusquent nullement les représentants d’une autre confession, au contraire, ils suscitent leur compréhension. En fait, les symboles religieux n’irritent que les athées et les tenants d’une idéologie laïcarde. Dans les rangs de ceux qui se battent contre les croix, on voit justement avant tout des athées militants.
       
 Peut-on dire qu’un lobby de politiciens soutenant activement la légalisation des unions homosexuelles et l’euthanasie, c’est-à-dire la levée des interdits qui ont régi la société durant des siècles s’est formé et agit dans les pays européens ? Y aurait-il une sorte de complot, non seulement anti-chrétien, mais plus généralement dirigé contre les normes de toutes les religions traditionnelles ?
-         De fait, le christianisme, la croix et les autres symboles chrétiens font à ces gens l’effet d’un chiffon rouge agité devant un taureau. Rien d’étonnant à ce que ces symboles suscitent leur irritation : la position du christianisme est très claire sur toutes ces questions.
Nous l’avons souvent dit, dans certaines églises chrétiennes, et en particulier dans l’Église d’Angleterre, les représentations traditionnelles sur les normes morales sont de plus en plus floues. La doctrine morale telle qu’elle s’exprime dans l’Écriture Sainte, le Nouveau Testament, les Évangiles, les épîtres apostoliques, les œuvres des Pères de l’Église, est remplacée par les normes libérales, peu à peu incorporées à la doctrine  morale de certaines églises, les obligeant à modifier leurs postulats éthiques pour satisfaire aux standards laïcs contemporains.
Je m’en souviens très bien, car j’ai suivi des études en Grande-Bretagne de 1993 à 1995. En deux ans, j’ai pu voir de mes yeux comment la société anglaise et les médias s’enfonçaient un peu plus dans le gouffre du sécularisme.
Je me souviens d’une question posée pendant une émission de télévision (« Hard Talk », il me semble) : « Les prêtres doivent-ils nécessairement croire en Dieu ? » C’était d’ailleurs le titre de l’émission.  Le sujet s’inspirait du cas d’un prêtre, Antony Freeman. Il venait d’écrire un livre dans lequel il démontrait que Dieu n’existait pas en tant qu’être personnel, que Dieu était une notion inventée par les gens en vue de leur perfectionnement moral. Lorsque ce livre avait été examiné par les autorités ecclésiastiques, le châtiment infligé à l’auteur avait été le suivant : il avait un an pour réfléchir, on lui conseillait de revoir sa position. Et pendant un an, il a continué à agir comme n’importe quel prêtre anglican, il a continué à célébrer sans croire en Dieu.
Ce genre de phénomènes existait déjà dans les années 90 en Angleterre. Et le processus n’a fait que s’accentuer.       
  
Quelles  perspectives peut-on envisager ? Ce processus peut-il vraiment déboucher sur des persécutions violentes contre l’Église dans les décennies à venir, non seulement en Europe, mais en Russie ? On observe en effet dans notre société une montée des sympathies anticléricales : de la fameuse danse de ces filles dans l’église du Christ-Sauveur au scandale autour de l’appartement du Primat en passant par les lettres de Berezovski au Patriarche, tout cela forme une seule et même campagne.
-         Il faut voir les choses en face, ce n’est pas de l’anticléricalisme, il y a des gens remontés contre l’Église qui organisent ce genre de campagne dans notre société comme dans la société occidentale.
Pour en revenir à l’Occident, il me semble que ce processus ne peut se poursuivre indéfiniment. Au moins pour la simple et bonne raison qu’il prend une tournure suicidaire pour la société occidentale. Soit les nations européennes seront éliminées physiquement, soit la direction de ces pays se reprendra et reviendra sur ses positions.
Pourquoi parler d’élimination physique ? Parce que l’idéologie athée libérale qui prévaut aujourd’hui dans beaucoup de pays occidentaux en veut non seulement à la religion, mais également, et avant tout, à des structures de base de l’existence humaine comme la famille et les valeurs familiales.
Quel est le résultat de la propagande de l’homosexualité ? Il y a de plus en plus d’unions homosexuelles, prétendant au statut de mariages. Il va de soi que ces unions ne laissent pas de descendants. La destruction de l’idéal familial traditionnel entraîne la rarification des familles nombreuses. Aujourd’hui, en Occident comme en Russie, la famille nombreuse est une rareté. Dans la plupart des cas, les familles nombreuses sont issues du monde musulman, ce sont pas des familles chrétiennes, ni d’autant moins des familles athées.
Autrement dit, la crise démographique dont souffrent aujourd’hui les états occidentaux a déjà provoqué une diminuation de la population. Et elle continuera à diminuer si ces normes libérales forment la base de la législation, s’imposent à l’opinion publique et sont propagées par les médias.
Si les hommes d’état comprennent un jour que cette voie est sans issue et prennent des mesures pour que la situation change, la tendance peut être inversée. S’ils refusent de le comprendre et s’obstinent jusqu’au bout, je dirais que l’Empire occidental risque de connaître la même destinée que de nombreux grands empires qui périrent principalement à cause de leur désagrégation morale. L’Empire romain, par exemple.
       
Quelles sont les conséquences possibles pour la Russie ? La Russie faisant partiellement partie de l’Europe, toutes ces tendances, même dans plusieurs années et affaiblies, ne manqueront pas de venir jusqu’à nous.
-         Je pense que la Russie ne doit pas avoir peur de suivre sa propre voie. Depuis plusieurs siècles, depuis l’époque de Pierre le Grand, nous essayons d’intégrer la culture occidentale, la société occidentale, la mentalité occidentale. Nous y parvenons plus ou moins, dans certains domaines nous faisons déjà partie de la société occidentale. Mais nous avons réussi jusqu’à présent à conserver notre identité.
Sans entrer en conflit avec l’Occident, sans nous opposer artificiellement au monde occidental, nous pouvons et nous devons cependant conserver et développer notre identité culturelle, nationale et spirituelle. La Russie est un pays dont la population est majoritairement orthodoxe et où vivent depuis des siècles des représentants d’autres confessions.
Je pense que tout croyant dans notre pays doit s’efforcer avant tout de vivre suivant sa foi, suivant les commandements qu’enseigne son Église ou sa confession religieuse. Afin que l’appartenance à une confession ne soit pas simplement un fait culturel, mais influence le quotidien de tout homme.
Si, par exemple, la religion enseigne que la famille est l’union d’un homme et d’une femme, le croyant doit considérer la famille sous cet angle. Si la religion enseigne que les couples doivent avoir autant d’enfants que leur en donne Dieu, et non pas autant qu’ils le planifient – et c’est ce qu’enseignent aussi bien le christianisme que le judaïsme ou l’islam, les gens doivent vivre suivant ces commandements.
Nous ne survivrons que pour autant que nous nous conformerons sérieusement aux commandements moraux de nos traditions religieuses.
Dans les pays musulmans et les régions où les représentations traditionnelles de la famille dominent, l’augmentation de la population est régulière. Là où ces représentations ne sont plus en vigueur ou sont déformées, la population décroît, on observe une crise démographique. C’est un indice simple et clair.
-         Nous faisons porter de grandes responsabilités aux hommes politiques, aux législateurs. Que peuvent faire encore les chrétiens ordinaires d’Europe pour sauver de l’extinction  la population de souche du continent? Et quelle aide l’Église orthodoxe russe peut-elle apporter ?
-         Nous devons en premier lieu veiller à l’intangibilité des bases de la doctrine et des fondements de la morale que nous avons hérités du Christ lui-même, des apôtres, de l’Église primitive et qui ont traversé les siècles au prix du martyre de beaucoup. Je pense que la force de l’Église orthodoxe réside dans sa capacité de résistance aux tendances du moment, dans ce qu’elle ne modifie ni sa doctrine, ni sa morale pour complaire aux normes libérales laïques.
Voilà pour l’Église orthodoxe, disons, en tant qu’organisation. En ce qui concerne les fidèles, force est de constater un fait très concret : nos paroissiens sont loin de tous vivre suivant les commandements du Christ. Et ceux qui se disent orthodoxes sont loin d’être tous paroissiens de nos églises, de participer à sa vie et à ses sacrements. Allons plus loin, la doctrine de l’Église est loin de servir à tous de repère dans la vie quotidienne.
Lorsque nous apprendrons à organiser notre vie quotidienne suivant les bases morales que prêchent les traditions religieuses, nous pourrons alors dire que la religion compte sérieusement pour nous.

( à suivre)

site officiel du département des affaires ecclésiastiques extérieures du patriarcat de Moscou  
-

lundi 9 avril 2012

Histoire du moine alcoolique





Il était une fois sur le mont Athos un moine qui vivait à Karyès. Il buvait et s'enivrait tous les jours et était cause de scandale pour les pèlerins. Finalement, il mourut. Cela soulagea les fidèles qui allèrent dire au staretz Païssios qu'ils étaient enchantés que cet énorme problème ait finalement été résolu.

Le Père Païssios leur répondit qu'il était au courant de la mort du moine, parce qu’il avoir vu un bataillon entier d'anges venus recueillir son âme. Les pèlerins, surpris, protestèrent et se mirent à expliquer au staretz de qui exactement ils parlaient, pensant qu’il n'avait pas compris.

Le staretz Païssios leur expliqua : « Ce moine est né en Asie Mineure, peu de temps avant que les Turcs fassent la razzia de tous les garçons. Pour éviter qu'ils le leur prennent, ses parents l'emmenaient avec eux à la moisson, et pour qu'il ne pleure pas, ils mettaient du raki dans son lait afin de le faire dormir. Par conséquent, il a grandi alcoolique.

Plus tard, il trouva un staretz et lui expliqua comment il était devenu alcoolique. Le staretz lui dit de faire des métanies [prosternations] et des prières tous les soirs et de prier la Toute Sainte de l'aider à réduire d'une unité les verres qu'il buvait.

Après une année, il réussit à force de la lutte et de pénitence à réduire les 20 verres qu'il buvait à seulement 19. La lutte a continué au fil des ans et il est descendu 2 ou 3 verres, qui le rendaient encore ivre.

Le monde a vu pendant des années un moine alcoolique qui a scandalisé les pèlerins, mais Dieu a vu un combattant qui a mené une longue lutte afin de réduire sa passion. »

Sans savoir comment chacun essaie de faire ce qu'il veut faire, de quel droit de jugeons-nous son effort?

Source : http://orthodoxologie.blogspot.fr/



































samedi 7 avril 2012

Christ, notre Pâque



 la Fete des fetes

La Résurrection
de notre Seigneur Jésus Christ


Icône de l’évêque Jean de Saint-Denis

Christ est ressuscité !
En vérité Il est ressuscité !

Et il a ressuscité avec lui notre nature humaine
qu’il a établie à la droite du Père



         « Si l’expérience du mal et de la douleur du monde est puissamment ressentie par vous en vos cœurs et en ce temps, alors sachez que cela vous est donné comme le tombeau même du Christ, et que ce tombeau est la chambre nuptiale des noces de Dieu avec notre humanité. »
                  
         Embrassons-nous du saint baiser qu’Il a posé sur la mort pour vivre!
                                          

dimanche 1 avril 2012

Lettre pastorale pour Pâques


Lettre pastorale pour la Pâque de l’an 2012


Aux fidèles et clercs bien-aimés de Dieu
de l’église catholique orthodoxe de France

I
l est actuellement de bon ton en France, par un Français auprès des Français, de décrier son pays, sa terre, de crier que tout se vaut puisque rien n’a vraiment de valeur vraie, de s’angoisser régulièrement et quotidiennement de préférence, puisqu’il n’y a de Dieu ni dans l’univers ni dans le cœur, de mépriser le politique toujours menteur, avide et incompétent, de rechercher mollement quelques tâches auxquelles se dévouer sans mettre en cause les vacances fréquentes, de célébrer les anniversaires douloureux, personnels ou collectifs, de montrer hargne, rogne et grogne comme le soulignait un général célèbre, de nier ou de vanter en toutes choses les aspects multiples de l’âme… et principalement de jalouser son voisin.
« Il est de bon ton pour Dieu » auprès des Français de leur susciter, en ce même temps, des inspirations pour l’esprit, des causes à défendre, des épreuves pour transformer les cœurs, des personnes dévouées et des serviteurs fidèles attachés à promouvoir la communion universelle et à découvrir la personne unique.
Vous direz peut-être qu’il en va ainsi pour tous les peuples. Vous aurez raison et vous aurez tort :
-                     raison car il n’y a nul peuple qui ne soit éprouvé et parfois méprisable en certaines mœurs, à certaines époques ; raison aussi car tout peuple est connu de Dieu et tenu par l’Esprit-Saint au sein de la symphonie-cacophonie des nations ;
-                     vous aurez tort car les Français ont des caractères spécifiques où la jalousie tient la tête des maux.
Laissant la recherche de la vertu qui tiendrait en France la tête des bienfaits, nous pouvons et devons ouvrir les yeux et les oreilles pour chercher l’issue à ces maux.
Souvenez-vous en et lisez le chapitre 4 (1-10) de la Genèse : la jalousie se jette sur le frère, sur l’autre, sur l’innocent et même sur Dieu pour le supprimer, pour le tuer. Elle prépare pour les siens une réputation désastreuse d’arrogance, une répulsion sans fin, un isolement physique et spirituel. Elle soumet les siens à l’hostilité de l’univers car tout l’échauffe et l’alimente, elle verse le sang dans ses accès de violence, elle se persécute elle-même, elle a fort mauvaise opinion d’elle-même.
Comment combattre ce plus terrible des défauts, comment domestiquer son énergie ou, mieux, l’éradiquer, l’anéantir ? Sommes-nous capables de mener individuellement et collectivement la lutte ? Pouvons-nous affronter face à face l’esprit meurtrier qui sous-tend la jalousie ? Et, si nous nous donnons à ce combat, par où pouvons-nous commencer, par l’intérieur ou par l’extérieur ?
La tradition primordiale de l’humanité et les sagesses, reçues ou acquises, recommandent de ne jamais s’opposer de front à un tel ennemi. Elles disent de se préparer à passer à l’autre bord, comme on passe une rivière, par un saut vital, sans transition, l’autre bord étant l’acquisition d’un aspect essentiel de la charité qui consiste – sans démériter, sans jugement sur soi-même – à se réjouir de son frère, à donner sa vie pour lui, à le servir, s’il s’agit de Dieu (qui est le Tout-Autre) à Le désirer sans restriction aucune.
Soit, à opérer une pâque. Cet exercice pascal porte le nom de pénitence, de pâque ascétique et nous savons par Jésus, notre Maître et Sauveur, qu’ « il y aura plus de joie dans le ciel pour un seul pécheur qui se repent que pour quatre-vingt-dix-neuf justes qui n’ont pas besoin de repentir (Lc 15, 7). »
Cette pâque, la pénitence courageuse, entraînera la joie parce qu’elle supprime le  goût du meurtre inscrit dans l’âme et dans le corps essentiellement par la jalousie. Au passage à l’autre rive la joie se lèvera.
Ayant introduit la France pour ce propos, faut-il alors envisager d’emmener tous les Français vers le don de soi, l’amour et le service du frère ? Certes non, car le petit nombre y suffit, au commencement. Où trouver le petit nombre ? Peut-être dans l’église du lieu, celle qui dispose en son cœur, comme toute église, de la présence de Celui qui a accompli la plus sublime de toutes les pâques – le passage par toute mort, celle du don de sa vie par l’amour des hommes.
Appuyés sur Lui, les pénitents joyeux sont certains de réussir, de tuer toute montée du meurtre en eux et autour d’eux, que ce soit le meurtre venu du mépris, de la jalousie et de l’envie, du jugement, de l’égoïsme, de la vanité, de l’orgueil ou de toute autre source.
Nous, disciples du Christ, avons le privilège de pouvoir suivre l’Agneau immolé dès la fondation du monde jusqu’à son immolation pascale. Il nous procurera ainsi la joie parfaite de la Résurrection.
Allons ainsi, là où nous vivons, au delà de nos qualités et de nos défauts, en disciples du Christ qui opèrent une multitude de pâques personnelles dans la lumière de sa Pâque et la puissance de sa Résurrection.
Christ est ressuscité. Alleluia !

Votre évêque
X  Germain.

Pour tous les chrétiens d'occident qui suivent le calendrier grégorien, catholiques romains, protestants, orthodoxes, demain commence la Semaine sainte. Il y aura pour moi pendant cette sainte hebdomade abstinence de publication

Je veux néanmoins anticiper la Pâque en diffusant une lettre pastorale qui me paraît mériter attention et méditation. 

Je souhaite à tous une Semaine sainte vivifiante culminant en la Pâque glorieuse.  

"Les Pères de l’Église et la chair"





Pascal-Grégoire Delage (éd.), « Les Pères de l’Église et la chair. Entre incarnation et diabolisation, les premiers chrétiens au risque du corps. Actes du Actes du Ve  Colloque de La Rochelle 9, 10 et 11 septembre 2011 », CaritasPatrum, Royan, 2012, 454 p.

L’Association CaritasPatrum anime, sous la direction du père Pascal-Grégoire Delage et d'Annie Wellens (dont les chroniquesdéjantées et pleines d'humour valent le détour), un site internet très vivant sur les Pères de l’Église. Elle organise aussi tous les deux ans à La Rochelle des colloques à leur sujet, et vient de publier les actes du colloque tenu en 2011 sur le thème de la chair. Ce mot ambigu, qui désigne tantôt le corps et tantôt ce qui s’oppose à l’esprit, occupe une place importante dans les épîtres de saint Paul et dans les œuvres des Pères de l’Église. Les vingt-cinq communications reproduites dans ce volume abordent différents problèmes posés par le sens du mot, et un certain nombre de réflexions développées par les Pères de l’Église du Ier au IVe siècle sur ce thème important de la pensée chrétienne affrontée, tant à l’extérieur d’elle-même qu’en son sein, à un corps tantôt dévalué, tantôt surévalué, et tantôt réévalué. Les exposés sont riches et variés, mais on constate un léger déséquilibre en faveur des Pères latins et au détriment des Pères grecs pourtant très prolixes sur le sujet.

Nous donnons ci-dessous la liste des communications, regroupées par thèmes et selon l’ordre où elle sont été présentées.Problématiques bibliques et premiers jalons.

- Yves-Marie BLANCHARD,  La dialectique chair /esprit dans l’Evangile selon saint Jean.

- Marc COUMONT, La vie selon la chair, la vie selon l’Esprit, approches pauliniennes.
- Bernard POUDERON,  « Né de la chair de Marie » (Valentin – Justin – Tertullien).
- Marie-Laure CHAIEB, La faiblesse de la chair  selon Irénée de Lyon, de l’opiniâtreté à assumer la corporéité dans la relation à Dieu
- Magdalena DIAZ-ARAUJO, Le « péché de la chair » dans la « Vie grecque d’Adam et Eve ». La relation entre la chair et le mauvais penchant dans une tradition judéo-hellénistique.
Approfondissement doctrinal et nouvelles pratiques  
- Gilles DORIVAL, Origène, théologien de la chair.
- Jérôme ALEXANDRE, Tertullien: la chair paradoxale.    
- Marie-Françoise  BASLEZ, Les représentations du corps dans les récits de martyre, penser le corps ressuscité.
- Emmanuel SOLER, Incarnation, corps saints et purification des corps dans la prédication chrysostomienne.
- Benoît JEANJEAN, A propos des « œuvres de la chair »,  l’interprétation et l’utilisation de Ga 5, 19-21 chez les Pères latins.
- Delphine VIELLARD, Les citations patristiques sur la relation entre le mariage  et l’union charnelle 
dans la « Question 27.2 du Décret de Gratien ».
Entre répulsion et apprivoisement
- Michel COZIC, Lettre d’Eutrope à la riche chrétienne Cerasia ébranlée jusque dans son âme par la maladie.
- Aline CANELLIS, Jeûne et éloge de la gourmandise dans le « De Helia et Ieiunio » d’Ambroise de Milan.
- Françoise THELAMON, Ascèse alimentaire et vie angélique: l’idéal de perfection des moines d’Egypte au IVe siècle.
- Pascal-Grégoire DELAGE, De la chair éprouvée des saintes femmes.
- Sophie MALICK-PRUNIER, « Horace et le psautier », images plurielles du corps féminin dans l’hymne 
à Eulalie de Prudence, Perist. 3.
La chair comme lieu de salut
- Marcel METZGER, Sexualité et mariage dans les « Constitutions apostoliques »: la voie moyenne.
- Benoît GAIN, La défense du mariage en Asie Mineure et en Syrie au IVe siècle.
- Dominique LHUILLIER-MARTINETTI, Le mariage et l’inflexion chrétienne : l’âge de la nubilité dans les écrits d’Ambroise de Milan
- Pierre DESCOTES, Nihil est animae sua carne propinquius: le rapport entre la chair et l’âme selon saint Augustin.
- François-Xavier BERNARD, Le corps malade et les pratiques médicales chez Augustin.
Actualisation et perspectives
-  Jean-Claude LARCHET, La valorisation du corps dans la théologie, l’anthropologie et la spiritualité patristiques
- Véronique MARGRON, Une éthique théologique en faveur du corps de chair.
- Annie WELLENS, Du  discernement  œnologique  chez  les  Pères  de  l’Eglise, boire ou se bien conduire, faut-il choisir ?
- Béatrice CASEAU, Conclusions.
L ‘ouvrage sera diffusé à partir du mois de juin par les Éditions du Cerf. Avant cette date il peut être commandé au siège de l’association CaritasPatrum. Voirici les modalités.


Mon ami A Valle Sancta me pardonnera (c'est chrétien !!!) de pour une fois lui brûler l'herbe sous le pied...

Ce sujet est extraordinairement important car, principalement en Occident, des générations et des générations de catholiques romains ont été torturés moralement, il n'y a pas d'autre mot, par une ascèse dévoyée et mortifère issue d'une exégèse partielle et partiale  des textes de saint Paul, exégèse qui a considéré la chair comme uniquement pécheresse, alors que, comme il est dit dans la présentation ci-dessus, le terme chair, "sarx", a deux acceptions.   

On ne peut que se réjouir de voir la pensée théologique occidentale (car c'est surtout elle qui est en scène) revenir à des appréciations plus justes et plus équilibrées sur les thèses augustiniennes.