jeudi 20 juin 2013

A propos du suicide de Dominique Venner


En se suicidant en plein cœur et en plein chœur de Notre-Dame de Paris, devant le maître autel,  le 21 mai 2013, Dominique Venner a lancé un appel qu’il voulait retentissant. C’est ce qu’expliquent tous ceux qui l’ont connu de près. Il a voulu sonner l’alarme, « ébranler les somnolences », a-t-il écrit dans le billet ultime de son blog[1], réveiller un peuple endormi, hébété et anesthésié. Il a voulu rendre conscient ce peuple de la perte de substance dont il est de plus ou moins bon gré victime, non pas seulement par une sorte de déliquescence chaque jour aggravée, comme sous l’effet d’une septicémie, mais à cause d’un double phénomène sciemment délibéré, et pour dire le mot, d’un complot : d’une part les « projets pervers par lesquels les fanatiques de la déconstruction veulent détruire un peu plus les derniers fondements qui structurent encore les sociétés européennes »[2] ; et d’autre part « le crime visant au remplacement de nos populations »[3] Par cette double accusation, il visait la légalisation du mariage homosexuel, et  l’immigration.

Sur le mariage, il s’inscrit avec force dans cette tradition millénaire que j’ai décrite dans un de mes récents billets et qui est celle du « mariage matrimonial », comme je l’ai qualifiée, par opposition au « mariage conjugal » qui s’impose de plus en plus. Il la définit de la manière la plus rigoureuse :
« Le mariage […] ne se rapporte pas à l’amour, même s’il en est parfois [ !] la conséquence. Le mariage est l’union d’un homme et d’une femme en vue de la procréation. Si l’on enlève la différence de sexe et la procréation, il ne reste rien, sauf l’amour qui peut s’évaporer. A la différence du Pacs, le mariage est une institution en vue des enfants à venir, et pas un simple contrat. »[4]
C’est pourquoi « il faudrait être aveugle pour ne pas voir dans cette mobilisation [celle des opposants au » mariage pour tous »] sa réalité : une révolte de masse contre la destruction de la famille, pilier ultime de notre civilisation européenne ébranlée. »[5]

A ces attaques sournoises contre le pilier de la civilisation, s’ajoute un péril de masse véritablement catastrophique : l’immigration « afro-maghrébine », phénomène qui n’est pas seulement subi passivement mais est activement encouragé et stimulé par tous les gouvernements qui se sont succédé « depuis 40 ans ». Et l’accomplissement et le parachèvement de ce mouvement historique sera « le « grand remplacement » de population de la France et de l’Europe, dénoncé par l’écrivain Renaud Camus »[6], changement de peuple qui entraînera automatiquement un changement de civilisation ; et, dans la civilisation, la religion.

(Le lecteur qui sait un peu d’histoire ne peut pas ne pas évoquer les invasions barbares en Occident, aux Ve et VIe siècles, qui eurent la même double et triple conséquence.)

J’ai cité Renaud Camus. J’estime intéressant de faire écho à quelques-unes de ses réflexions[7]. Interrogé sur le suicide de Dominique Venner et son « message posthume » il dit :

«Je l’ai reçu avec beaucoup d’émotion, beaucoup de tristesse, beaucoup de respect et une certaine exaltation. Ce geste tragique, et en même temps admirablement calculé, est un geste de désespoir qui s’inscrit dans la tradition des immolations de Prague[8], ou des immolations de bonzes tibétains aujourd’hui, pour essayer d’alerte le peuple sur l’horreur de ce qui survient, qui est très expressément désigné par Dominique Venner : c’est-à-dire le changement de peuple et le changement de civilisation que cela implique nécessairement.[…]
« Le geste de Dominique Venner est aussi un geste d’espérance contre l’hébétude dans laquelle nous sommes plongés. C’est un appel au réveil. Je trouve très  intéressant le rapport qu’il a établi avec les manifestations contre le prétendu mariage pour tous. Nous sommes exactement dans la même position à cet égard : le mariage pour tous est un indice et il s’étonne que cette question dérisoire [ce n’est pas exactement l’appréciation de Dominique Venner] tout-à-fait secondaire, absurde, arrive à mobiliser le peuple, particulièrement les chrétiens. C’est une bonne chose, mais il se lamente de voir que ce même peuple, notamment les chrétiens, sont incapables de se mobiliser contre le changement de peuple. Le symptôme les affole, et ils protestent à juste titre contre ce symptôme, mais ils ne protestent pas du tout contre la chose même, c’est-à-dire le changement de civilisation. C’est une bonne chose de se mobiliser contre le symptôme, mais, ce qui est désespérant, c’est de ne pas se mobiliser contre le mal. »
A propos du mariage homosexuel (et il ne faut pas oublier que Renaud Camus est un représentant brillant de « la cause homosexuelle ») :
«  C’est l’histoire du sexe des anges… Une civilisation menacée, qui est en train de mourir, se préoccupe d’une idiotie pareille qu’est le mariage pour tous ! » Intéressant.
Interrogé à propos de l’Eglise « catholique universelle », qui « ne s’occupe pas des races », Renaud Camus a ce jugement impitoyable :
« A propos de l’Eglise universelle, je pense toujours au mot terrible de Jaurès, lorsque l’Eglise a commencé à avoir une politique sociale : ‘’ L’Eglise a commencé à se préoccuper des pauvres quand elle a appris qu’ils allaient faire un gros héritage.’’ C’était assez bien vu. On a un peu le même sentiment aujourd’hui. Les chrétiens de France doivent bien se rendre compte qu’aujourd’hui l’Eglise n’a été associée à la France et à la patrie que quand elle a cru que c’était un pouvoir, une puissance, et elle se montre, à quelques notables exceptions qui sont admirables, fort indifférente au sort de la patrie et du peuple français. Ce ne sont pas ses affaires, si je puis dire… Elle est étonnamment favorable au changement de peuple, à la grande substitution… »
A propos de son dernier livre « Les inhéritiers » :
« Je pense que l’effondrement de l’héritage, la fin de la transmission, est absolument nécessaire à l’accomplissement du changement de peuple. Comme je le répète incessamment, et sans doute à l’excès, qui connaît ses classiques ne se laisse pas mener sans rechigner dans les poubelles de l’histoire… L’effondrement de la transmission est la condition absolue du changement de civilisation. 
L’industrie de l’ hébétude sous ses formes diverses, que ce soit l’effondrement  du système éducatif, l’imbécilisation par le biais des médias, l’économie parallèle et le développement de la drogue, tout cela crée un homme décultivé, décivilisé et déraciné, qui est nécessaire aux intérêts industriels et financiers mondiaux. Cet homme remplaçable est nécessaire au triomphe de l’économie mondialisée. Elle a besoin de ce pion que rien ne rattache à rien et que l’on peut placer où l’on veut et délocaliser. Tout cela se tient profondément. »

J’arrête là. Je n’adhère pas à tout, mais je tiens que cette analyse implacable – qui est aussi celle de Dominique Venner – dans son ensemble est hélas ! très lucide.

Revenons à lui, qui est l’objet du présent billet, et venons-en à mes propres réflexions. On a parlé de sacrilège, de scandale. Scandale oui, puisque d’aucuns se sont scandalisés. Mais sacrilège, je ne le pense pas. Il y a sacrilège dès lors qu’il y a volonté délibérée d’en commettre un. Les dépoitraillages des Femens dans la même cathédrale étaient des sacrilèges. Les tags, graffiti et autres actes de vandalisme qui se multiplient dans les églises sont autant de sacrilèges. Mais les réactions scandalisées dans les médias se font rares, timides, chuchotées… Dominique Venner a-t-il voulu commettre un sacrilège ? Evidemment non. Non seulement il n’était pas chrétien mais il n’était pas croyant. Il niait l’existence d’un au-delà. Il n’est que de lire ce billet du 21 mai qu’on peut considérer comme un testament :
« Il faudrait nous souvenir aussi, comme l’a génialement formulé Heidegger (Être et Temps) que l’essence de l’homme est dans son existence et non dans un « autre monde ». C’est ici et maintenant que se joue notre destin jusqu’à la dernière seconde. Et cette seconde ultime a autant d’importance que le reste d’une vie. C’est pourquoi il faut être soi-même jusqu’au dernier instant. »[9]
Non seulement  Dominique Venner n’était pas chrétien mais il était hostile au christianisme. Il lui reprochait d’avoir affadi,  amolli, efféminé la véritable civilisation occidentale, la civilisation gréco-romaine. Soit dit en passant, Maurras avait exactement la même appréciation. Et s’il est mort réconcilié avec l’Eglise, affirme-t-on, c’est qu’il n’a pas « été soi-même jusqu’au dernier instant ».

Dominique Venner était un intellectuel païen à l’ancienne, c’est-à-dire athée ; un stoïcien. Pour eux, le suicide était une porte de sortie honorable et noble. Je l’avais un peu vite comparé à Socrate : non, Socrate était croyant. Mais Caton l’ancien, oui ; Sénèque, oui ; et de nos jours, Montherlant. Son suicide est un suicide à l’antique.

Certains milieux religieux ont parlé à son propos d’ « offense à Dieu ». Franchement, c’est une stupidité. D’abord, puisqu’il ne croyait pas en Dieu, il n’avait évidemment nulle intention  de l’offenser. Ensuite, si offense à Dieu il doit y avoir, infiniment plus grave et criminelle celle dont se rendent coupables ceux qui tuent leurs frères humains, surtout dans les guerres entreprises par des motifs de religion. Ceux-là vont directement contre la loi d’amour.

Suicide à l’antique, ai-je dit. Ou à la japonaise. Au Japon, le seppuku est ou plutôt était la forme la plus honorable de suicide des samouraïs ; il n’est que de citer le seppuku le plus célèbre des temps modernes, celui de Yukio Mishima. Et justement doit paraître sous peu un ouvrage posthume de Dominique Venner intitulé « Un Samouraï d’Occident. Le bréviaire des insoumis » - ouvrage annoncé par lui dans l’éditorial de La Nouvelle Revue d’Histoire référencé en note, mais dont le titre a été amputé de son début : « Un Samouraï d’Occident ». Préméditation : il fallait éviter de mettre trop tôt les lecteurs sur la piste.

Pourquoi alors avoir choisi la cathédrale de Paris pour sa « seconde ultime » ? tout simplement parce qu’elle est la cathédrale de Paris, intimement liée depuis 850 ans aux vicissitudes de l’histoire du pays de France et de son peuple. Un monument historique pour donner à son acte une résonance historique. Ce qui appert  de son message d’adieu que je publie en annexe.

D’où ma seconde réflexion. A-t-il eu, cet acte, la résonance historique recherchée ? Nullement. A part les proches de Dominique Venner, à part les abonnés de sa Nouvelle Revue d’Histoire (dont je suis, parce qu’elle ne sacrifie ni au politiquement correct ni à l’historiquement correct, qui sont les deux faces de la même médaille), qui s’est ému ? Personne ! Qu’en est-il advenu dans les médias ? « Un écrivain d’extrême droite se suicide dans une église ». Point. Fermez le ban.
Dominique Venner  s’est complètement trompé de cible. Il fallait qu’il se suicide dans la grande  mosquée de Paris : là, on en aurait parlé ! Et comment ! Les plus grands esprits se trompent, et souvent.

Deux faits ont joué contre lui : sa position dans la droite extrême, son refus de l’immigration non européenne. Deux crimes irrémissibles. Et qui ont rendu sa voix inaudible. Et pourtant, ce qu’elle dit mérite attention.

Mais Cassandre n’est jamais entendue.

20 juin 2013


ANNEXE :
La lettre d’adieu de Dominique Venner
Je suis sain de corps et d’esprit, et suis comblé d’amour par ma femme et mes enfants. J’aime la vie et n’attends rien au-delà, sinon la perpétuation de ma race et de mon esprit. Pourtant, au soir de cette vie, devant des périls immenses pour ma patrie française et européenne, je me sens le devoir d’agir tant que j’en ai encore la force. Je crois nécessaire de me sacrifier pour rompre la léthargie qui nous accable. J’offre ce qui me reste de vie dans une intention de protestation et de fondation. Je choisis un lieu hautement symbolique, la cathédrale Notre-Dame de Paris que je respecte et admire, elle qui fut édifiée par le génie de mes aïeux sur des lieux de cultes plus anciens, rappelant nos origines immémoriales.
Alors que tant d’hommes se font les esclaves de leur vie, mon geste incarne une éthique de la volonté. Je me donne la mort afin de réveiller les consciences assoupies. Je m’insurge contre la fatalité. Je m’insurge contre les poisons de l’âme et contre les désirs individuels envahissants qui détruisent nos ancrages identitaires et notamment la famille, socle intime de notre civilisation multimillénaire. Alors que je défends l’identité de tous les peuples chez eux, je m’insurge aussi contre le crime visant au remplacement de nos populations.
Le discours dominant ne pouvant sortir de ses ambiguïtés toxiques, il appartient aux Européens d’en tirer les conséquences. A défaut de posséder une religion identitaire à laquelle nous amarrer, nous avons en partage depuis Homère une mémoire propre, dépôt de toutes les valeurs sur lesquelles refonder notre future renaissance en rupture avec la métaphysique de l’illimité, source néfaste de toutes les dérives modernes.
Je demande pardon par avance à tous ceux que ma mort fera souffrir, et d’abord à ma femme, à mes enfants et petits-enfants, ainsi qu’à mes amis et fidèles. Mais, une fois estompé le choc de la douleur, je ne doute pas que les uns et les autres comprendront le sens de mon geste et transcenderont leur peine en fierté. Je souhaite que ceux-là se concertent pour durer. Ils trouveront dans mes écrits récents la préfiguration et l’explication de mon geste.
*Pour toute information, on peut s’adresser à mon éditeur, Pierre-Guillaume de Roux. Il n’était pas informé de ma décision, mais me connaît de longue date.







[1] « La manif du 26 mai et Heidegger », courrier publié sur son blog le 21 mai – le jour même de son suicide !
[2] La Nouvelle Revue d’Histoire, n° 66, mai-juin 2013, éditorial, page 5.
[3] L’Hebdo Bourseplus n° 698, 24 mai 2013, page 28.
[4] La Nouvelle Revue d’Histoire, n° 66, mai-juin 2013, éditorial, page 5.
[5] Ibid.
[6] Renaud Camus, Le Grand Remplacement, David Reinharc (2011) ; Le Grand Remplacement, suivi de Discours d'Orange, seconde édition augmentée, chez l'auteur (2012).
Dans cet ouvrage, Renaud Camus désigne le flot migratoire sous le terme de « contre-colonisation » de la France, notion censée représenter non seulement le phénomène démographique, mais aussi l'hostilité des nouveaux arrivants vis-à-vis de la civilisation de leur pays d'accueil. Mettant en cause les médias, il indique que la France est en guerre mais qu'aucun d'entre eux ne veut le dire. Cette situation lui rappelant le début de la guerre d'Algérie. (source Wikipédia).
On peut ajouter que les prises de position politiques de  Renaud Camus l’ont conduit à être privé d’éditeur (en l’occurrence Fayard). Et on critique la censure de l’ancien régime !
 [7] L’Hebdo Bourseplus n° 698, 24 mai 2013, page 28.
[8] L’étudiant thèque Jan Palach  s’immola par le feu le 16 janvier  1969 sur la place Venceslas (Vaclav) à Prague pour protester contre l’invasion de son pays par les forces russes et l’arrestation (et la mise à mort) du réformateur Alexandre Dubĉek. L’emplacement de son sacrifice (maintenant marqué par une plaque votive) est constamment fleuri. La même année, deux autres étudiants suivirent son exemple, mais ils sont bien moins connus.
[9]   « La manif du 26 mai et Heidegger », courrier publié sur son blog le 21 mai.

mercredi 19 juin 2013

La rédemption et la glorification du corps selon saint Paul




8.18
J'estime que les souffrances du temps présent ne sauraient être comparées à la gloire à venir qui sera révélée pour nous.
8.19
Aussi la création attend-elle avec un ardent désir la révélation des fils de Dieu.
8.20
Car la création a été soumise à la vanité, -non de son gré, mais à cause de celui qui l'y a soumise, -
8.21
avec l'espérance qu'elle aussi sera affranchie de la servitude de la corruption, pour avoir part à la liberté de la gloire des enfants de Dieu.
8.22
Or, nous savons que, jusqu'à ce jour, la création tout entière soupire et souffre les douleurs de l'enfantement.
8.23
Et ce n'est pas elle seulement; mais nous aussi, qui avons les prémices de l'Esprit, nous aussi nous soupirons en nous-mêmes, en attendant l'adoption, la rédemption de notre corps.

 Epître aux Romains , 8, 18-23

Les moralistes qui attribuent à l'apôtre Paul une condamnation radicale du corps se fourvoient, comme on voit par le texte ci-dessus, à cause de leur interprétation erronée de la conception que lui-même se fait de la chair, ainsi que je le montrerai ultérieurement.

Le christianisme n'a jamais méprisé le corps, créature de Dieu. Même l'ascèse la plus rigoureuse est une sorte d'hommage au corps ; elle tend à le rendre digne d'avoir part à la résurrection en gloire.

samedi 15 juin 2013

La laïcité selon le pape François

«Le principe de laïcité (…) ne doit pas signifier en soi une hostilité à la chose religieuse»

Samedi 15 juin, le pape François a reçu 45 parlementaires français au Vatican. Nous relayons ci-dessous le discours du pape tel que retranscris par le journal La Croix :
Pape François« Monsieur le président, chers Parlementaires,
Faisant suite à votre demande, je suis heureux de vous recevoir ce matin, membres du Sénat et de l’Assemblée nationale de la République française.
Au-delà des différentes sensibilités politiques que vous représentez, votre présence manifeste la qualité des relations entre votre pays et le Saint-Siège.
Cette rencontre est pour moi l’occasion de souligner les relations de confiance qui existent généralement en France entre les responsables de la vie publique et ceux de l’Église catholique, que ce soit au niveau national ou au niveau régional ou local. Le principe de laïcité qui gouverne les relations entre l’État français et les différentes confessions religieuses ne doit pas signifier en soi une hostilité à la réalité religieuse, ou une exclusion des religions du champ social et des débats qui l’animent. On peut se féliciter que la société française redécouvre des propositions faites par l’Église, entre autres, qui offrent une certaine vision de la personne et de sa dignité en vue du bien commun.
L’Église désire ainsi apporter sa contribution spécifique sur des questions profondes qui engagent une vision plus complète de la personne et de son destin, de la société et de son destin. Cette contribution ne se situe pas uniquement dans le domaine anthropologique ou sociétal, mais aussi dans les domaines politique, économique et culturel. En tant qu’élus d’une Nation vers laquelle les yeux du monde se tournent souvent, il est de votre devoir, je crois, de contribuer de manière efficace et continue à l’amélioration de la vie de vos concitoyens que vous connaissez particulièrement à travers les innombrables contacts locaux que vous cultivez et qui vous rendent sensibles à leurs vraies nécessités.
Votre tâche est certes technique et juridique, consistant à proposer des lois, à les amender ou même à les abroger. Il vous est aussi nécessaire de leur insuffler un supplément, un esprit, une âme dirais-je, qui ne reflète pas uniquement les modes et les idées du moment, mais qui leur apporte l’indispensable qualité qui élève et anoblit la personne humaine. Je vous formule donc mes encouragements les plus chaleureux pour continuer dans votre noble mission,cherchant toujours le bien de la personne en promouvant la fraternité dans votre beau pays.
Que Dieu vous bénisse !« 
 
Le discours n’a pas eu l’heur de plaire aux médias et aux socialistes,

L'Ordre et la Bienfaisance

Sur le blog du Grand Prieuré des Gaules vient d'être publiée une très précise étude intitulée "La nature de l'Ordre maçonnique" où l'accent est mis à juste titre sur la notion si importante dans le Régime rectifié de Bienfaisance.( http://www.gpdg.org/la-nature-de-lordre-maconnique/)

Il m'a paru judicieux de publier une allocution sur ce thème prononcée par le Grand Aumônier dudit Grand Prieuré des Gaules à l'occasion de la fête annuelle de la Saint-Michel en 2001.




L’Ordre et la Bienfaisance


La Divine Providence, qui gouverne toutes choses et fait concourir à l’accomplissement de ses desseins même les entreprises des impies, a, l’année passée[1], précisément de cette façon, rendu au Régime Ecossais Rectifié sa liberté et, par conséquent, son intégrité, son authenticité et sa dignité d’Ordre.

Cependant, le retour du Régime à ses origines ne peut pas, ne doit pas être seulement de nature institutionnelle et structurelle. Ce doit être un retour à son inspiration première, à son esprit primitif ; et il est désormais de sa pleine et entière responsabilité qu’il en soit ainsi. Nous, et nous seuls, serons responsables, et comptables devant Dieu, de ce que nous, et nous seuls, ferons de l’Ordre.

Quel est cet esprit primitif ? Le titre même choisi pour l’Ordre par ses fondateurs l’indique de la façon la plus nette. Ce titre, en vérité, est double : Ordre Bienfaisant des Chevaliers Maçons de la Cité Sainte, et Ordre des Chevaliers Bienfaisants de la Cité Sainte.

L’Ordre est bienfaisant, ses Chevaliers sont bienfaisants. C’est leur titre distinctif. Et c’est aussi celui des Francs-Maçons, membres de la classe symbolique de l’Ordre. Dans le Catéchisme ou instruction par demandes et réponses pour le grade d’apprenti Franc-Maçon on lit :

« Comment un Franc-Maçon doit-il se distinguer des autres hommes ?

-    Par une bienfaisance active et éclairée, par une façon de penser noble et élevée, par des mœurs douces et une conduite irréprochable[2]. »

Et à peine est-il besoin de rappeler que la Règle Maçonnique consacre à la bienfaisance les cinq paragraphes de son article V.

L’Ordre est bienfaisant, disais-je. Il l’est par nature. C’est, est-il dit au Chevalier nouvellement armé, un « Ordre de bienfaisance et de lumière ». Pour l’Ordre, ne pas pratiquer la bienfaisance, c’est se dénaturer, s’enfoncer dans la voie ténébreuse du reniement de soi-même.

Le Chevalier, lui, est bienfaisant par état. Pour lui, ne pas pratiquer la bienfaisance, c’est déroger, c’est perdre la noblesse d’âme qui qualifie son état.

Le Franc-Maçon, enfin, est bienfaisant par devoir d’apprentissage : il apprend la bienfaisance comme le reste. Pour lui, ne pas le faire, c’est comme redevenir profane.

Mais qu’est-ce donc que la bienfaisance, pour être à ce point essentielle à l’Ordre et à ses membres ?

Au Convent de Wilhelmsbad, en sa deuxième séance, celle du 29 juillet 1782, Henri de Virieu présenta, sur l’ordre du prince Ferdinand de Brunswick, un Mémoire sur les idées que l’Ordre doit attacher au terme de bienfaisance. On sait qu’Henri de Virieu, en dépit de son jeune âge (28 ans à l’époque), était un des collaborateurs les plus actifs et les plus dévoués de Willermoz et un de ses hommes de confiance.

Son mémoire reçut le meilleur accueil du Convent, qui l’adopta, ordonna qu’il fût joint aux Actes, en même temps que le Projet de Chapitre pour le nouveau Code maçonnique qui en reprenait la substance. Ces deux documents constituent les pièces 95 et 96 des Actes du Convent.

Ecoutons donc Virieu :

« Il s’agit de fixer invariablement le véritable sens que l’Ordre doit attacher au terme de bienfaisance, qui est le cri universel et le point de ralliement de tous les Francs-Maçons. Tous en effet s’en servent également, tous en font la base de leurs systèmes, tous veulent qu’elle dirige également et les formes et les actes de notre institution. Mais faute de s’être entendu sur la véritable signification de cette expression, quoique tous aient en apparence le même objet, tous varient dans les applications, et presque tous, se bornant à des points de vue particuliers d’une chose qui ne devait être considérée que dans son ensemble le plus vaste, se sont renfermés dans des sphères trop rétrécies, d’où il est résulté une multitude de systèmes différents sur la manière dont l’Ordre doit diriger ses travaux. Tous ces systèmes, occupés uniquement à propager les branches particulières de la bienfaisance qu’ils prennent pour son véritable tronc, sont susceptibles d’être conciliés facilement lorsqu’on cessera de particulariser ce qui doit être général, lorsqu’on ne bornera plus le sens d’un mot destiné à exprimer une vertu dont l’essence est d’être sans bornes, comme l’amour de l’Etre éternel pour toutes les créatures, qui en est le principe. [3]»

Retenons d’emblée ceci : la bienfaisance est illimitée, parce qu’elle procède de l’amour divin, qui est lui-même illimité.

Poursuivons :

« Ce n’est point dans des discussions académiques ni grammaticales que nous devons chercher la solution qui nous occupe. C’est au fond du cœur que doit exister l’image qu’il s’agit d’exprimer. Lui seul doit juger si le tableau est conforme au modèle, et si, après avoir entendu ce mémoire, le cœur, satisfait des idées qu’il renferme, se sent entraîné, leur donne son approbation, il ne faut pas aller plus loin : la question est décidée, et un Ordre aussi complètement voué à faire le bien ne peut hésiter à adopter un sens qui lui ouvre la carrière la plus vaste pour remplir de la manière la plus étendue qu’on puisse concevoir son objet sacré. »

Retenons encore ceci : la vocation de l’Ordre est de faire le bien, et cette vocation est sacrée.

Poursuivons encore :

« La vertu qu’on nomme bienfaisance est cette disposition de l’âme qui fait opérer sans relâche en faveur des autres le bien, de quelque nature qu’il puisse être. Cette vertu embrasse donc nécessairement un champ immense, car son essence étant d’opérer le bien en général, tout ce que l’esprit peut concevoir de bien dans l’univers est de son ressort et doit être soumis à son action. C’est de cette manière que l’homme doit envisager et pratiquer la vertu par laquelle il se rend le plus semblable à son principe infini dont il est l’image, à ce Principe de bonté qui, voulant sans cesse le bonheur de toutes ses productions sans exception, agissant sans cesse pour le procurer, est ainsi éternellement et infiniment bienfaisant.

« Telle est donc l’idée que l’on doit se former de la bienfaisance, qu’elle doit s’étendre sans exception à tout ce qui peut être véritablement bon et utile aux autres, qu’elle ne doit négliger aucun des moyens possibles de l’opérer. Celui qui se borne à donner des secours pécuniaires à l’indigence fait à la vérité un acte de bienfaisance, mais ne peut légitimement obtenir le titre de bienfaisant ; non plus que celui qui croit avoir satisfait à tout en protégeant l’innocence, ou celui qui se réduit à soulager ses Frères souffrants, ou même celui qui dans un ordre bien supérieur ferait consister toute sa bienfaisance à éclairer et instruire ses semblables.

« Car tous ces biens pris séparément ne sont que des rameaux divers du même arbre, qu’on ne peut isoler sans les priver de leur vie. Mais celui-là seul mérite véritablement le titre de bienfaisant, qui, pénétré de la sublimité de son essence, considérant la grandeur de sa nature formée à l’image et à la ressemblance du principe éternel de toute perfection, l’œil fixé sur cette source infinie de toute lumière, de tout bien, pour l’imiter et accomplir ainsi les devoirs sacrés qui lui sont imposés par sa nature, sent que, de même que la bonté éternelle embrasse tous les êtres, tous les temps, tous les lieux, de même la bienfaisance, qui n’est que la manifestation de la bonté, doit être sans bornes ; que créé à l’image et à la ressemblance divine, il viole sa propre loi lorsqu’il oublie le devoir d’imiter sans relâche son modèle et qu’il ne manifeste son existence à tous les êtres que par ses bienfaits. »

Voilà. L’essentiel est dit, cet essentiel qui est l’essence de notre Ordre parce qu’elle est l’essence de notre être.

Nous sommes, tout un chacun, créés à l’image et à la ressemblance divine. L’image perdure en chacun de nous en dépit de la chute, mais nous avons à ré-acquérir, à reconquérir la ressemblance à l’image, la déiconformité. Tel est l’objet et le but que l’Ordre s’assigne : nous en procurer, le Christ aidant, et en coopération avec son Eglise, les moyens, par les secours que la Divine Providence nous a elle-même ménagés : l’initiation maçonnique chrétienne, l’action chevaleresque chrétienne.

Dieu est amour. La bienfaisance est la modalité pratique de la charité, cette vertu divine, la plus sublime de toutes, et qui subsisterait seule si toutes les autres disparaissaient – comme nous l’enseigne l’apôtre Paul (au chapitre 13 de la première épître aux Corinthiens). La charité est le canal de toutes les grâces, pour celui qui la pratique comme pour ceux envers qui il la pratique. Oui, la charité, cette disposition du cœur spirituel, et la bienfaisance, qui en est le bras armé, sont le vrai moyen de nous faire les imitateurs de notre Divin Maître et Seigneur, auteur de toutes grâces. Elle est un moyen de déification. Voilà pourquoi la bienfaisance restaure notre nature essentielle, et que ne pas la pratiquer est un crime contre nous-mêmes.

« Charité bien ordonnée commence par soi-même ». Je dirai que l’Ordre, dans son action, doit être cette charité bien ordonnée qui commence par soi-même, se répand abondamment sur autrui, et retourne à Dieu qui en est la source, en nous amenant – ou nous ramenant – dans son intimité dont nous nous sommes nous-mêmes chassés.

La bienfaisance ne doit donc pas être désordonnée, « particularisée », comme dit Virieu, ni circonstancielle, elle doit être générale, permanente et coordonnée. Elle doit être conduite en ordre, dans l’Ordre et par l’Ordre. C’est ce qu’exprime Virieu avec une grande fermeté :

« C’est donc s’abuser profondément que d’accorder le titre général de bienfaisance à des actes particuliers de cette vertu dont l’essence est d’embrasser sans exception tous ceux qui peuvent tendre à faire le bien de l’humanité.

« Notre Ordre respectable ayant pour objet la manifestation de cette vertu, n’en doit pas plus borner les applications que le sens : rien de ce qui peut être utile à l’humanité, sans en excepter ses propres membres, qui sont les premiers appelés à recueillir les fruits précieux de l’institution qui les unit, ne doit lui être étranger, et sa devise générale devrait être : Boni nihil a me alienum puto (« j’estime que rien de ce qui est bien ne m’est étranger »).

« Cessant donc de morceler la bienfaisance, ainsi qu’on l’a presque toujours fait, de la diviser en une infinité de branches isolées, et par conséquent de l’affaiblir, de la dégrader, réunissons au contraire toutes celles qu’il est possible de concevoir pour en former la bienfaisance générale de l’Ordre. Répandu ou destiné à se répandre sur toute la surface de la terre, possédant dans son sein des membres de tous les rangs, de tous les états, de tous les pays, réunissant ainsi ou susceptible de réunir au plus haut degré tous les genres de connaissances, de talents et de moyens, gardons-nous d’atténuer les résultats qu’on doit attendre d’une si grande combinaison de forces ; que la bienfaisance universelle de l’Ordre, uniforme dans son principe, c’est-à-dire active, éclairée et fondée sur l’amour le plus ardent de l’humanité et le respect le plus profond pour les lois du Grand Architecte de l’Univers, soit dans ses applications aussi variée que les besoins de l’humanité. Que toutes les parties de l’Ordre et tous ses membres s’accordent simplement à donner sans cesse l’exemple pratique de la vertu, de l’attachement et du respect pour la divinité et ses lois, du patriotisme, de la soumission au Souverain et aux lois, en un mot : de toutes les vertus religieuses, morales et civiles, parce que cette manière d’être utile à l’humanité, en même temps qu’elle est la plus efficace, est universelle et n’admet aucune exception ni pour les temps, ni pour les lieux, ni pour les circonstances. Quant aux biens particuliers que notre institution peut répandre sur la famille humaine, qu’ils dépendent des moyens, des facultés, des circonstances, des localités de chaque établissement et de chaque individu.

« Que dans un lieu nos établissements fondent des moyens de soulager les pauvres et les malades, que dans un autre ils ouvrent des asiles à l’indigence et à la vieillesse, qu’ici l’on élève des orphelins, que là on établisse des écoles où chacun puisse apprendre ce qu’il doit à Dieu, à son Souverain, à sa patrie, à ses frères, à lui-même ; où l’on puisse cultiver et favoriser tous les genres de connaissances utiles au bonheur de l’humanité et capables de porter les hommes au bien et à la vertu ; que chaque établissement, chaque individu soit certain d’avoir rempli les vues de l’Ordre lorsque, suivant sa situation et ses moyens, il aura accompli dans sa sphère le genre de bien qui aura pu y être de la plus grande utilité. En un mot, je le répète, qu’aucun genre de bienfaisance ne nous soit étranger, que ce soit là le lien commun qui réunisse toutes les parties de l’Ordre, que quels que soient les systèmes que l’on pourra adopter ailleurs, ils aient tous ces principes pour base immuable, et pour objet premier fondamental inaltérable de faire à l’humanité le plus de bien possible, dans le sens le plus étendu que l’esprit peut concevoir. »

Beau programme, me dira-t-on, mais comment faire, démunis comme nous sommes ?

Eh bien, démunis, nous ne le sommes que relativement à notre société qui, même si, hélas, elle compte un nombre croissant de pauvres, dans son ensemble est riche.

Mais je rentre d’un voyage en Afrique, et là on est témoin de ce qu’est la misère totale. Or la différence de niveau de vie est telle que 10 de nos euros produisent là-bas un effet équivalent à 1.000 euros, que leur capacité est centuplée, ce qui nous met à même d’agir avec une efficacité réelle.

Je veux donc vous donner une consigne : tous ceux qui en ont la possibilité, qu’ils recensent les établissements tenus (ceci est important) par des congrégations religieuses, de quelque confession qu’elles soient : dispensaires, écoles, maternités, orphelinats, etc., qu’ils communiquent ces adresses à l   a Grande Chancellerie ainsi qu’à moi-même, afin qu’ensuite, en Conseil national, nous fassions une sélection de ceux que nous pourrions aider d’une façon permanente[4].

J’ai ici le programme d’action d’une Grande Loge étrangère qui vient en aide de cette façon permanente à quatre institutions : un centre de soins pour enfants et adolescents souffrant de maladies chroniques graves ; un foyer d’enfants victimes de maltraitance ; un service hospitalier d’oncologie pédiatrique (c’est-à-dire pour enfants cancéreux) ; enfin un home d’enfants dont la santé et la moralité sont en danger à la suite de carences parentales. Je vous l’avoue, lorsque j’ai reçu ce prospectus, j’ai admiré – et j’ai eu honte ! Nous devons agir ; il est temps, il est grand temps !

Autre chose : je ne pense pas être désavoué par le Grand Maître et le Député Maître Général en vous donnant consigne d’appliquer effectivement et à la lettre ce que dit le rituel de banquet concernant la dîme, c’est-à-dire que la dixième partie des frais de banquet doit être mise de côté pour les pauvres. Je sais que des Loges le font déjà, mais désormais toutes doivent le faire. Et nous les solliciterons pour aider à financer les actions dont j’ai parlé plus haut.

Bien entendu, il y a aussi les quêtes lors des tenues et des chapitres recueillies dans ce qu’on appelle, justement, le « tronc de bienfaisance ». Toutes additionnées, elles peuvent constituer un moyen d’action efficace : les petits ruisseaux font les grandes rivières.

Enfin – et ceci est de l’ordre du symbole, mais j’y tiens – je demande aux chefs de l’Ordre d’accepter que, dans le Livre d’Or de notre Ordre qui sera constitué à partir du Code des Chevaliers Bienfaisants de la Cité Sainte et du Code Maçonnique, soit inclus en annexe, conformément à la décision du Convent de Wilhelmsbad, ce chapitre supplémentaire sur la bienfaisance approuvé par lui – décision que les malheurs des temps ne permirent pas d’exécuter. Je souhaite aussi que ce chapitre soit lu une fois l’an dans les Loges et fasse l’objet des réflexions des Frères – et les incite à agir.

Comme l’apôtre Paul aux Corinthiens, j’ai envie de vous dire :

« De même que vous excellez en toutes choses, en foi, en parole, en connaissance, en zèle à tous égards, et dans votre amour pour nous, faites en sorte d’exceller aussi dans cette œuvre de bienfaisance. Je ne dis pas cela pour donner un ordre, mais pour éprouver, par l’exemple du zèle des autres, la sincérité de votre charité ». (2 Corinthiens 8, 7-8)

Quant à ma conclusion, je l’emprunterai elle aussi à Henri de Virieu, Eques a Circulis :

« C’est ainsi que l’Ordre doit envisager le sens du terme de bienfaisance. C’est ainsi qu’en l’adoptant dans la plus grande étendue dont il soit susceptible, cet Ordre si répandu, si éclairé doit se tracer une carrière de bienfaisance, aussi vaste que le principe vivant dans lequel cette vertu prend sa source, principe qui n’est, je le répète, que cette bonté, cet amour infini du Grand Architecte de l’Univers pour toutes ses créatures, que tout homme, né à l’image et ressemblance divine, est tenu d’imiter, et dont il trouve au fond de son cœur de si délicieuses récompenses lorsqu’il est fidèle à cette loi imprimée si profondément dans tout son être. »


Très Révérend Eques a Tribus Liliis, Grand Aumônier des Ordres



ANNEXE :

Projet de Chapitre pour le nouveau Code Maçonnique
déposé aux Actes par ordre du Convent

L’Ordre étant spécialement voué à la bienfaisance, et voyant combien l’on a en général d’idées vagues et peu uniformes sur le sens de cette expression, croit devoir fixer invariablement celui qu’il y attache et le développer dans toute son étendue, pour servir à jamais de base et de règles à tous ses travaux et pour que chacun de ses membres puisse s’instruire clairement et positivement des devoirs qu’il contracte en y entrant.

On entendra par bienfaisance cette vertu qui fait opérer pour le bien de l’humanité tout le bien possible dans le sens le plus étendu que l’esprit puisse concevoir. Il n’est aucune manière de faire le bien de l’humanité qui n’entre dans le plan que l’Ordre se propose. Dans ce sens, l’exemple pratique du respect pour la divinité, du patriotisme, de la soumission aux Souverains et aux lois, des mœurs, d’une modération sage qui ne permet point à un Ordre uniquement voué à la bienfaisance et à la paix de s’ingérer dans des discussions intolérantes capables de troubler les sociétés, en un mot de toutes les vertus religieuses, morales et sociales, l’occupation à répandre à propos les conseils de la sagesse, à faire régner la paix entre les hommes, à les soulager, les soutenir, les éclairer, les instruire, les éduquer, leur inspirer l’amour de la vertu, rien en un mot de tout ce qu’il est possible de concevoir et d’opérer en faveur de l’humanité n’est étranger à cette bienfaisance active, éclairée et universelle que l’Ordre se propose et exige de tous ses membres.

Si les bornes des facultés et des moyens, soit généraux, soit particuliers, ne permettent pas de se livrer à la fois dans tous les moments et dans tous les lieux à tous les actes qu’un plan aussi vaste comprend, tous les établissements et tous les individus doivent au moins embrasser sans cesse par leur volonté et leurs désirs tous les moyens imaginables de répandre des bienfaits, et tous les êtres auxquels ils peuvent les étendre. Ils n’entreprendront aucun acte de bienfaisance sans se souvenir qu’il en reste un nombre infini auxquels ils ne peuvent se livrer encore, et sans former le projet d’en recommencer un autre dès que celui qui les occupe sera accompli, tellement que, dans aucun cas et dans aucun temps, ils ne puissent cesser un seul instant de travailler au bonheur de la famille humaine.

Qu’ils sachent que l’Ordre demande compte à tous en général et en particulier, sans exception, de l’inaction à cet égard, ainsi que de l’emploi faux et de l’abus des moyens qu’on aura eus entre les mains, parce que si la multitude infinie des besoins de l’humanité ne permet pas de subvenir à tous en même temps, rien ne peut dispenser de s’occuper sans relâche de satisfaire au plus grand nombre possible.

Chaque établissement et chaque individu sera certain de remplir sa tâche dans l’œuvre générale de l’Ordre et de satisfaire à tous ses devoirs, toutes les fois qu’il sera livré et occupé actuellement et efficacement, dans sa sphère, de l’espèce de bien la plus utile dont ses moyens et sa situation lui auront permis de s’occuper.

L’Ordre, sentant l’impossibilité de prescrire en détail tous les genres particuliers de bienfaisance qui composent sa bienfaisance générale et que chaque établissement, chaque individu, doit opérer suivant la mesure de ses moyens et sa situation, se borne à tracer les points généraux qui doivent être communs à tous, les divisions principales et l’ordre qu’il faudra observer entre elles autant que les circonstances le permettront, circonstances dont chaque établissement sera juge.

I° - L’on aura la plus scrupuleuse attention à donner sans relâche l’exemple du respect pour le Grand Architecte de l’Univers et ses lois, du patriotisme, de l’obéissance au Souverain et aux lois, des mœurs, de la bienfaisance, de la modestie, de la modération et de l’amour de la paix, en un mot de toutes les vertus religieuses, morales et civiles, parce que ce sont là les seuls points dans lesquels on puisse être tous utiles à l’humanité en commun, sans exception, dans tous les temps et dans tous les lieux, et que tous les biens qu’on peut lui faire sont sans prix et seront toujours stériles s’ils ne sont accompagnés de ceux-là.

II° - L’on envisagera que, l’instruction générale et particulière renfermant seule les vrais moyens d’attacher solidement les hommes à leurs devoirs et à la vertu, ce qui est le plus précieux bienfait que l’homme puisse répandre sur ses semblables, les établissements qui pourront tendre à la perfectionner paraissent devoir obtenir le premier rang parmi ceux dont on s’occupera.

III° - Ceux qui auront pour objet de soustraire à la misère et au vice les enfants orphelins ou abandonnés par leurs parents, pourront marcher de pair avec les précédents.

IV° - Les établissements destinés au soulagement des misères locales, des maladies, de la pauvreté et au soutien de la vieillesse, viendront ensuite.

V° - Enfin ceux qui peuvent tendre à détruire l’oisiveté, à répandre les lumières, l’industrie, l’activité ne seront pas négligés parce que rien de ce qui peut être utile ne doit l’être.






[1] Très exactement le 13 juin 2000, date à laquelle la Grande Loge Nationale Française a dénoncé irrégulièrement son accord du 13 juin 1958 avec le Grand Prieuré des Gaules.
[2] Rituel d’apprenti….
[3] Cahier vert n° hors série, 2005, pp. 101-104
[4] Etant précisé que  le Grand Prieuré des Gaules a passé un accord avec l’association Cœur Monde pour les actions humanitaires, et que ces nouvelles actions pourraient lui être  déléguées avec son accord.

vendredi 14 juin 2013

Avertissement

Comme des "amis" sûrement bien intentionnés ont dévoilé mon patronyme et les fonctions que j'occupais au Grand Prieuré des Gaules, je me vois contraint de publier le présent avertissement.

Bien que j'aie indiqué de la manière la plus formelle sur la page d'accueil de ce blog que je n'étais le porte-parole d'aucune Eglise ni d'aucun organisme initiatique et que je n'énonçais que des opinions strictement personnelles, certains ont feint de croire que, du fait de mes fonctions de Grand Aumônier du Grand Prieuré des Gaules, mes prises de position l'engageaient.

C'était évidemment faux, et ce l'est encore moins maintenant que je n'ai pas demandé le renouvellement de cette charge que j'occupais depuis environ 20 ans.

Ainsi donc, depuis le 27 avril 2013, je ne suis plus titulaire d'aucune charge nationale ni locale au sein du Grand Prieuré des Gaules. Plus aucun amalgame n'est par conséquent possible.

Qu'on se le dise !

lundi 10 juin 2013

La persécution des chrétiens de Syrie


Il faut lire les événements du Proche-Orient à la lumière de la guerre qui se déroule en Syrie. Tout ce qui se passe là-bas est présenté comme une guerre civile, mais en réalité sont impliquées d'autres puissances extérieures, qui veulent avoir de l'influence dans la région. D'un côté, la Turquie, l'Arabie saoudite et le Qatar, et de l'autre, la Russie, l'Iran et la Chine. Nous sommes clairement face à une crise géopolitique, parce que la Syrie est dans une zone critique où de nombreux pays ont des intérêts.

Cependant, ce qui échappe à l'attention de beaucoup, c'est qu'en Syrie c’est qu’est perpétré massacre de la population chrétienne. Récemment, cela est devenu patent avec  l'enlèvement du métropolite orthodoxe Paul et du métropolite syro-jacobite Jean-Ibrahim. Cette triste réalité montre le visage farouche de la guerre dans la région. Pourtant, les difficultés pour les chrétiens sont pires encore.

Stathis Efstathiades ("To Vima tis Kyriakis" [La Tribune du Dimanche] 19/05/2013) nous donne des informations importantes que voici :

Un bulletin de la Commission de l'Union Européenne du 16 Avril révèle que le nombre de chrétiens qui ont été tués, assassinés ou portés disparus, "est suspecté d'avoir dépassé le chiffre de 1.220". Un ecclésiastique syro-orthodoxe d'Amman (monophysite) a déclaré à la CNN arabe que "nous avons une persécution équivalente au massacre de Dioclétien". Il a poursuivi: "Ceux qui n'ont pas réussi à partira auront le sort de nos compatriotes orthodoxes en Irak".

Et parce qu'il est fait mention des chrétiens en Irak, nous devrions enregistrer les déclarations de Nina Sia qui est le porte-parole de la Commission interaméricaine des droits de l'homme, selon lesquelles, pendant la période de deux ans de 2012-2013 en Irak "un total 2.310 Irakiens, membres des minorités religieuses dont les chrétiens sont majoritaires, ont été assassinés, étranglés et ont disparu." Le jour de Noël 2012 également "il n'y avait pas une église qui célébrait la liturgie", car elles avaient été toutes incendiées et détruites ; la plupart des membres du clergé ont fui l'Irak ou se sont cachés", car ils [les chrétiens] sont et restent la principale cible des islamistes". Et ces choses se produisent en Irak depuis mai 2005, alors la guerre est "officiellement" terminée. Il semble qu'alors, a commencé une persécution organisée et systématique des chrétiens irakiens".

Cette année, qui se situe 1700 ans après l'édit de Milan (313 AD), qui a établi la liberté de religion dans l'Empire romain, se produisent de terribles persécutions contre les chrétiens (orthodoxes, monophysites), qui sont assassinés. Les libertés religieuses sont supprimées et la violence et l'inhumanité sont de retour.

Quoi qu'il se passe en Syrie ou en Irak, malheureusement, cela se fait avec l'assistance, la tolérance et la participation des nations chrétiennes d'Occident, parce que les facteurs économiques prépondérants.

Et nous, chrétiens orthodoxes, que devons-nous faire? Comment réagissons-nous? Sommes-nous émus par le sort de nos frères? Est-ce que leur drame nous concerne? Sommes-nous en train de prier pour eux? Sommes-nous peinés?

Version française Claude Lopez-Ginisty adaptée
d'après
http://www.parembasis.gr/
cité par

MYSTAGOGY

mercredi 5 juin 2013

Le corps selon saint Grégoire Palamas





Le corps n'est pas mauvais en soi
C'est aux hérétiques, frère, qu'il sied de parler ainsi, aux hérétiques qui disent que le corps est une chose maligne, qu'il est une confection du Malin. Quand à nous, nous pensons que le mauvais esprit est dans les pensées corporelles, mais qu'il n'y a pas de mauvais esprit dans le corps, puisque le corps n'est pas une chose mauvaise. (...)
Extrait de : Triade, I,1,1.

Corps spirituels
Avec la victoire de l'esprit, leur corps deviendra tellement subtil qu'il n'apparaitra plus du tout comme matériel et ne s'opposera plus aux énergies intellectuelles. C'est pourquoi, ils jouiront de la lumière divine avec leurs sens corporels eux-mêmes.
Triade, I,3,36.

Le corps peut devenir Esprit
De même la joie spirituelle qui vient de l'esprit dans le corps n'est pas du tout corrompue par la communion au corps, mais transforme le corps et le rend spirituel, parce qu'alors il rejette tous les mauvais appétits de la chair, ne tire plus l'âme vers le bas, mais s'élève avec elle, de sorte que l'homme tout entier devient Esprit, suivant ce qui est écrit : Celui qui est né de l'Esprit est Esprit (Jean, III, 6,8). Et tout cela est évident par expérience.
Extrait de : Triade II,2,8.

mardi 4 juin 2013

acquérir la paix intérieure

J'emprunte à l'excellent blog http://stmaterne.blogspot.fr/ les conseils suivants, qui sont de première importance.

Ils ne sont pas faciles à mettre en oeuvre, il faut s'y appliquer. Mais en cas de réussite, quelle sérénité !



Un jour je me trouvais dans un autobus, et le conducteur alluma la musique très fort. Quelques personnes pieuses lui firent remarquer qu'il y avait un moine à son bord et lui demandèrent avec insistance de l'éteindre. Ils essayèrent encore une ou deux fois, sans succès. Il augmenta même le volume. "Laissez-le donc" dis-je aux jeunes gens, "ce n'est pas important. Ça fait le "ison" pour mon propre chant."

Notre but devrait être de prendre tout ce qui nous arrive et d'en tirer le meilleur parti pour le bien du combat spirituel dans lequel nous sommes engagés. Nous devons nous efforcer d'acquérir la tranquillité intérieure, et dans ce but, même un vacarme peut devenir une bonne chose s’l est accueilli avec un bon état d'esprit... Lorsqu'au milieu du boucan, vous vous efforcez d'attendre la tranquillité intérieure, vous aurez accompli quelque chose de grande valeur. Si vous ne parvenez pas à trouver la tranquillité au milieu des perturbations, vous ne serez jamais tranquille, pas même au milieu de la tranquillité. Lorsque la tranquillité intérieure arrive à quelqu'un, tout ce qui est en lui sera apaisé, et il ne sera perturbé par rien. Mais s’il a besoin de la tranquillité externe pour trouver la tranquillité intérieure, alors lorsqu'il se trouvera en un tel endroit,  alors il voudra avoir une canne pour chasser les cigales le jour, et les chacals la nuit, afin qu'ils ne le perturbent pas!

Ancien Païssios l'Athonite