samedi 16 juin 2012

Karl Marx et la religion





On connaît la formule souvent répétée et devenue fameuse de Karl Marx : « La religion est l’opium du peuple », à laquelle on donne la portée d’une hostilité radicale à la religion en général et au christianisme en particulier.

Mais qu’on la replace dans son contexte, et l’on verra que cette portée est tout autre.
Qu’on en juge  :

« La misère religieuse est à la fois l’expression de la misère réelle et la protestation contre la misère réelle. La religion est le soupir de la créature accablée, le cœur d’un monde sans cœur, comme elle est l’esprit d’une existence sans esprit. Elle est l’opium du peuple… »
(Karl Marx, Sur la Critique de la Philosophie du Droit de Hegel, 1841-43).

« Le cœur d’un monde sans cœur », quelle formule admirable ! et les autres aussi. Cela signifie que, de même que l’opium est une drogue qui endort mais qui soulage les maux, de même la religion apporte au monde opprimé un soulagement. Que ce soulagement soit réel ou artificiel est une autre question, mais il existe et il est bienfaisant.

vendredi 15 juin 2012

Ne redoutez pas le conflit...


Ne redoutez pas le conflit, et ne le fuyez pas; où il n'y a pas de lutte, il n'y a pas de vertu. Notre foi, confiance et amour sont prouvés et révélés dans les adversités, c'est-à-dire dans les circonstances difficiles et pénibles, internes comme externes, durant la maladie, l'affliction et les privations.


saint Jean de Cronstadt






Source : 









mardi 12 juin 2012

La salle d'urgence pour l'âme



L'Orthodoxie propose une manière très précise pour entrer en communion avec Dieu. C'est un cheminement qu'il faut apprendre, car simplement "devenir Orthodoxe" n'amènera pas celui qui est en recherche à une vie intérieure qui transforme et illumine. L'appartenance à l'Église n'est tout simplement pas suffisante, car l'Église n'est pas une question de belles liturgies et icônes, ou de théologie mystique. En tant qu'hôpital de l'âme, l'Église est ce lieu au sein duquel nous pouvons recevoir la guérison de tout ce qui nous blesse. Elle est l'endroit où nous pouvons être guéris, et trouver la plénitude de l'être.

Comme dans la salle d'urgences d'un hôpital local, un patient ne peut pas se contenter d'y entrer et espérer être guéri. Il faut se soumettre à l'examen de l'équipe médicale, qui lui demandera de décrire les symptômes de ce dont il souffre, lui fera passer divers examens, et pour finir prescrira les médicaments nécessaires pour aboutir à la guérison.

Dans l'hôpital de l'âme, à savoir l'Église, ses prêtres tiennent le rôle du personnel des urgences. Ils interrogent le patient - le paroissien - et examinent son coeur pour trouver la maladie, et recommandent le remède. Le prêtre devient le thérapeute, recommandant au patient - celui qui est en recherche - ce qu'il peut faire pour parvenir à la plénitude.

Une règle de prière, la lecture quotidienne des saintes Écritures, les fréquentes confession et communion aux saints Mystères, tout cela fait partie des remèdes de l'Église qui amèneront à la guérison. De même que le médecin prescrira la bonne posologie, après examen de son patient, ainsi donc, le prêtre prescrit ce qui aidera son enfant spirituel.

La vie spirituelle est quelque chose qui nécessite un apprentissage, peut-être bien plus encore à notre époque qu'à n'importe laquelle de l'histoire du monde. Au plus que l'impiété et l'athéisme progressent, au plus en est-il de même pour les obstacles au progrès spirituel. La dégradation de notre société toute entière, la vie profondément dépravée, sont devenus des éléments normaux pour notre époque, la rendant dangereuse. La spiritualité individualiste peut rendre très vulnérable à l'illusion spirituelle. Nous avons tous besoin d'un guide expérimenté qui peut nous aider à éviter les pièges de l'orgueil et de l'assouvissement de sa propre volonté, qui nous mèneraient à la perdition.

Dans l'amour du Christ,
Hiéromoine Tryphon (Eglise Orthodoxe Russe Hors Frontières)

lundi 11 juin 2012

Sur l'Homme, Image de Dieu




Quand, des yeux de la Foy, je vois le premier Age,
Où tu formas de l’Homme & l’Esprit & le Corps [a],
Je te bénis, Seigneur, Tout-puissant & tout-sage,
Qui dans ce Composé versas tant de Trésors.

Ce fut là ton Chef-d’œuvre & ton plus noble Ouvrage,
            Dont le rare artifice & les nombreux ressorts
            Expriment clairement les traits de ton Image,
            Et causent dans mon Cœur de célestes Transports.

      Eternel, si dans moy ton Image est empreinte[b],
            Qu’admirant ton Pouvoir, je profite en ta Crainte,
            Et je t’offre les vœux de ma Fidélité.

                        Que mon Cœur, pour t’aimer, devienne tout de flamme ;
            Et que pour rendre Hommage à ta Divinité,
            Je consacre à ta Gloire, & mon Corps, & mon Ame.


            SONNETS CHRETIENS SUR DIVERS SUJETS
            DIVISES EN QUATRE LIVRES
            PAR Mr DRELINCOURT

            Livre Ier, sonnet X

            Edité et préfacé par Albert-Marie Schmidt
            Paris, Les Editions du Chêne, 1948



[a] Galien dit, qu’en reconnaissant Dieu pour l’Auteur de toute la belle Economie de notre Corps, il est assuré de lui chanter une Hymne beaucoup plus agréable que ne lui seraient toutes les Victimes et tous les Parfums.
[b] Allusion au mot de Jésus-Christ : Rendez à César, etc., c’est-à-dire, selon Saint Augustin, César exige de nous cette Impression de son Image, et Dieu vous demande l’Impression de la sienne, qui est votre Ame, dans son Essence, dans ses Facultés, et dans ses Habitudes.

Laurent Drelincourt (1626-1680) fils d'un pasteur huguenot renommé fut à son tour un des plus brillants représentants de l'Eglise réformée. Il conçut, et y réussit avec éclat, l'idée de mettre au service de l'expression de la foi et de la piété cette langue riche et ornée du temps de Henri IV et de Louis XIII telle qu'un saint François de Sales en avait donné l'exemple inégalé un demi-siècle plus tôt. Les linguistes ont pris l'usage de la qualifier "préciosité", terme qui n'implique aucun jugement de valeur mais désigne techniquement un certain état de la langue française, comme plus tard "galanterie" au début du règne de Louis XIV. 

Le professeur Albert-Marie Schmidt, qui en fut le spécialiste incontesté, a dans sa préface ces mots que je m'en voudrais de ne pas citer :
" [Laurent Drelincourt] voulut montrer que la spiritualité précieuse trouve dans la théologie son accomplissement. Ainsi mena-t-il à bien une oeuvre poétique qui n'a pas sa pareille au dix-septième siècle. [...] La préciosité cherchait,  lui semblait-il, la théologie. Il provoqua leur rencontre. Elle devint dans ses ouvrages une indissoluble union."

Ses cent-soixante "Sonnets chrétiens", parus en 1677, s'acquirent dès alors une renommée qui, dans le monde huguenot au moins, dura plus d'un siècle et demi, jusqu'à la révolution romantique. Leur somptuosité orchestrale,  leurs harmonies entrelacées, leur scintillance, leur exubérance, cette richesse foisonnante et pourtant secrètement ordonnée - toutes richesses bientôt abolies sous la sèche férule de Malherbe et de Vaugelas - auront-elles chances de résonner dans nos âmes contemporaines, si étrangères à l'idée même de préciosité ?

Je tente l'expérience. N'en fût-il qu'un pour s'en régaler, ce sera moi !  

La prière de Jésus


La prière de Jésus est l'arme la plus essentielle dans l'œuvre de notre salut. Mais celui qui l'entreprend, doit s'attendre à des tentations et être préparé à une bataille intérieure, une bataille contre les pensées. Les démons n'aiment pas la prière de Jésus et ils se vengent de celui qui les frappe avec ce glaive.

***

Que notre première tâche lorsque nous nous éveillons, soit de faire le signe de la Croix, et nos premières paroles, celles de la prière de Jésus.


***


Ne recherche pas seulement des délices dans la prière, ne sois pas découragé quand tu ne ressens pas de joie. Quelquefois, tu te tiens dans l'église et c'est comme si tu n'avais pas en toi de cœur, mais un morceau de bois, rèche et grossier. Et alors? Merci pour le morceau de bois, Seigneur! Cela veut dire que c'est ainsi que cela doit être. En faisant l'expérience de douces délices, une âme peut devenir imbue d'elle-même, mais une telle condition d'insensibilité de pierre, lui apprend l'humilité.


Version française Claude Lopez-Ginisty
d'après Saint Barsanuphe d'Optina
in
Living without Hypocrisy:
Spiritual counsels of the Holy Elders of Optina
Holy Trinity Monastery, Jordanville
NY/USA
2005



Saint Barsanuphe
Un des anciens (startzy) qui firent du monastère d'Optina le centre spirituel le plus rayonnant de la Russie orthodoxe aux XIXe et XXe siècle, jusqu'à la révolution bolchevique qui dispersa les moines et les assassina et détruisit les bâtiments. Le monastère a été restitué à Eglise russe en 1987.
C'est d'Optina que la spiritualité hésychaste s'est répandue dans toute la Russie.

mercredi 6 juin 2012

Par le baptême, nous devenons parfaits (par Jean-Baptiste Willermoz)


Par le baptême, nous devenons parfaits
Par Jean-Baptiste Willermoz

Initiés, à l’instant que nous sommes régénérés, nous entrons dans la vie, nous recevons la lumière et nous connaissons Dieu qui est la source de toute vérité, de toute science et de toute perfection. Par le baptême, nous devenons parfaits ; l’Esprit-Saint nous sanctifie et la foi nous éclaire. Je leur ai dit : Vous êtes les dieux de la terre, vous êtes les enfants du Très-Haut (Ps. LXXXI). Cette opération de l’esprit s’appelle œuvre, grâce, illumination, perfection, baptême. C’est un baptême qui nous purifie, une grâce qui nous justifie, une illumination qui nous remplit de lumière et qui nous fait connaître les choses divines. Ce sont là les dons accomplis de l’Etre souverainement parfait. A sa voix, tout, en nous, est sorti des ténèbres ; il a anticipé les temps en notre faveur par sa toute-puissance, et nous vivons parce que J.-C. nous a délivrés de la mort. Dieu a créé l’univers par sa volonté, et par sa volonté il a fait le salut des hommes. Celui donc qui est acquitté par J.-C. sort aussitôt des ténèbres, il est au moment même rempli d’une céleste lumière comme ceux qui se réveillent sortent des liens du sommeil. La taie qui l’aveuglait est enlevée, l’obstacle qui l’empêchait de voir est écarté. Ainsi, notre régénération par le Saint-Esprit dissipe à l’instant les ténèbres épaisses qui nous dérobaient la lumière divine, elle enlève le bandeau qui couvrait l’œil de notre âme et la met en état de voir les vérités célestes.

Initiés, nous étions autrefois ensevelis dans les ténèbres, nous sommes maintenant la lumière du Seigneur ; c’est pourquoi les anciens appelèrent l’homme d’un nom qui signifie lumière.[1] Ainsi l’espérance de ceux qui ont cru n’a point été trompée ; ils reçoivent dès à présent les arrhes de la vie éternelle ; car le Maître leur a dit : qu’il soit fait selon votre foi.[2]  Voilà l’effet de cette œuvre divine en nous : nous ne sommes plus les mêmes hommes. La grâce de J.-C. a brisé nos liens, notre esprit a reçu une lumière éclatante ; mais les hommes qui sont encore dans les ténèbres ne peuvent concevoir comment la grâce nous a éclairés par la foi. Ils ne peuvent concevoir qu’étant ainsi dégagés de la servitude de la loi, nous sommes devenus esclaves du Verbe qui est la lumière du libre-arbitre : Je vous rends gloire, mon Père, Seigneur du ciel et de la terre, de ce que vous avez caché ces choses aux sages et aux prudents, et que vous les avez révélées aux simples et aux petits : oui, mon Père, cela est ainsi parce que vous l’avez voulu.[3] Que celui donc qui veut obtenir ce prix dompte la concupiscence et ses désirs charnels, qu’il abjure l’orgueil de la science humaine. C’est par cette victoire qu’il obtiendra la foi qui régénère l’esprit, éclaire l’intelligence et embrase le cœur par le feu et la lumière céleste (Clément d’Alexandrie dans son Pédagogue, chap. 6).

Jean-Baptiste Willermoz, Mes pensées et celles des autres, mises au jour et publiées pour la première fois par Robert Amadou, pensée 27, Renaissance Traditionnelle, n° 30 avril 1977, pp. 103-104.


[1] Fώς (terme poétique) = homme ; fῶς = lumière. Les deux se prononcent phôs.
[2]Matthieu 9, 29,  etc.
[3]Luc 10, 21.

lundi 4 juin 2012

Vous êtes modelés sur le Fils de Dieu


Vous êtes modelés sur le Fils de Dieu

Baptisés dans le Christ, revêtus du Christ, vous êtes modelés sur le Fils de Dieu. Car Dieu qui vous a prédestinés à l’adoption vous a modelés sur le corps glorieux du Christ. Désormais donc associés au Christ, il est normal que l’on vous appelle des « christs », et c’est de vous que Dieu disait : « Ne touchez pas à mes christs ! » (Ps 104, 15). Vous êtes devenus des christs parce que vous avez reçu la marque du Saint-Esprit ; et tout vous est arrivé en images, puisque vous êtes des images du Christ. Lorsque, baigné dans les eaux du Jourdain, et leur ayant communiqué les effluves de sa divinité, le Christ en fut remonté, le Saint-Esprit fit en personne irruption sur lui, le semblable se reposant sur son semblable. De même, remontés de la cuve aux saintes eaux, vous reçûtes la chrismation, la marque dont fut chrismé le Christ. Or cette chrismation est l’Esprit-Saint.
[…]
Et de même que le Christ fut réellement crucifié, enseveli et ressuscité, et que, vous aussi, par votre baptême, vous avez été admis à participer symboliquement à sa croix, à son tombeau et à sa résurrection, ainsi en est-il de la chrismation. Le Christ était chrismé d’une huile joyeuse et spirituelle, entendez de l’Esprit-Saint qu’on appelle huile d’exultation spirituelle ; quant à vous, vous avez été chrismés d’un baume qui vous a rendus participants et associés du Christ.


Saint Cyrille de Jérusalem, XXIe catéchèse baptismale ou IIIe catéchèse mystagogique¸ Paris, Migne, collection « Les Pères dans la foi », 1993, pp. 329-330.