dimanche 8 juillet 2012

Saint Irénée (II) : Dieu peut vivifier la chair...


Dieu peut vivifier la chair, et la chair peut être vivifiée par Dieu
Saint Irénée, Contre les hérésies, Livre V, chapitre 3, paragraphes 2 & 3





3, 2 Ils méprisent donc la puissance de Dieu et ne voient pas la vérité, ceux qui arrêtent leurs regards sur la faiblesse de la chair et ne considèrent pas la puissance de Celui qui la ressuscite d'entre les morts (Hébreux 11, 19). Car, s'il ne vivifiait pas ce qui est mortel et s'il n'élevait pas à l'incorruptibilité ce qui est corruptible (1 Corinthiens 15, 33), Dieu cesserait d'être puissant. Mais, qu'il ait la puissance de réaliser tout cela, notre origine doit nous le faire comprendre, puisque c'est en prenant du limon de la terre que Dieu a modelé l'homme (Genèse 2, 7). Pourtant, lui donner l'être, le créer animal vivant et doué de raison, quand rien n'existait, ni os, ni nerfs, ni aucun des autres éléments qui constituent l'organisme humain, c'était bien autrement difficile et incroyable que de le reconstituer après que, une fois venu à l'existence, il se serait dissous dans la terre, pour les motifs que nous avons dits précédemment, et qu'il serait retourné à ces éléments d'où il avait été tiré au commencement, alors qu'il n'existait pas encore. Car Celui qui a fait au commencement, quand il l'a voulu, ce qui n'était pas, saura à plus forte raison, s'il le veut, rétablir dans la vie qu'il donne ce qui a existé déjà. 

D'autre part, la chair se trouvera capable de recevoir et de contenir la puissance de Dieu, puisqu'au commencement elle a reçu l'art de Dieu et qu'ainsi une partie d'elle-même est devenue l'œil qui voit, une autre l'oreille qui entend, une autre la main qui palpe et qui travaille, une autre les nerfs qui sont tendus de toute part et qui maintiennent ensemble les membres, une autre les artères et les veines par où passent le sang et le souffle respiratoire, une autre les différents viscères, une autre le sang qui est le lien de l'âme et du corps — et que sais-je encore ? — car il est impossible d'énumérer tous les éléments constitutifs de l'organisme humain, qui n'a pas été fait sans la profonde sagesse de Dieu. Or ce qui participe à l'art et à la sagesse de Dieu participe aussi à sa puissance. 3, 3 La chair n'est donc pas exclue de l'art, de la sagesse et de la puissance de Dieu, mais la puissance de Dieu, qui procure la vie, se déploie dans la faiblesse (2 Corinthiens 12, 9), c'est-à-dire dans la chair. 

Au reste, qu'ils nous disent donc, ceux qui prétendent que la chair est incapable de recevoir la vie que Dieu donne, s'ils affirment cela tout en étant actuellement vivants et tout en ayant part à la vie, ou s'ils reconnaissent n'avoir absolument rien de la vie et être présentement des morts. Mais, s'ils sont morts, comment peuvent-ils se mouvoir, parler et accomplir toutes les autres actions qui sont le fait, non des morts, mais des vivants ? Et s'ils vivent présentement, si tout leur corps a part à la vie, comment osent-ils dire que la chair est incapable d'avoir part à la vie, alors qu'ils reconnaissent avoir présentement la vie ? C'est comme si, tout en tenant en mains une éponge pleine d'eau ou une torche allumée, on prétendait que l'éponge est incapable d'avoir part à l'eau, ou la torche à la lumière ! De cette même manière, ces gens assurent qu'ils vivent, se glorifient de porter la vie en leurs membres ; puis, se mettant en contradiction avec eux-mêmes, ils prétendent que leurs membres sont incapables de recevoir la vie. Si cette vie temporelle, bien moins vigoureuse que l'éternelle vie, est néanmoins assez puissante pour rendre vivants nos membres mortels, pourquoi la vie éternelle, qui est plus efficace, ne vivifierait-elle pas la chair déjà exercée et accoutumée à porter la vie ? 

Ainsi donc, que la chair soit capable de recevoir la vie, cela se prouve par cette vie même dont elle vit déjà présentement : elle vit aussi longtemps que Dieu veut qu'elle vive. Et que, d'autre part, Dieu soit capable de lui donner cette vie, c'est évident : dès lors que Dieu nous donne la vie, nous vivons. Si donc Dieu est capable de donner la vie à l'ouvrage par lui modelé et si la chair est capable de recevoir cette vie, qu'est-ce qui empêche encore la chair d'avoir part à l'incorruptibilité, qui n'est autre chose qu'une vie longue, voire sans fin, octroyée par Dieu ?

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