10 février 1763 : traité de Paris par lequel La Nouvelle-France est effacée de la carte du monde.
Il met fin à la "Guerre de Sept Ans" entre d'une part la France et l'Espagne et d'autre part l'Angleterre. Il est suivi 5 jours plus tard par le traité de Hubertsbourg entre d'une part la France et l'Autriche et d'autre part la Prusse. La Russie avait déjà signé une paix séparée avec la Prusse en mai 1762.
Ainsi était mis fin à cette guerre ruineuse qu'on a qualifié de "première guerre mondiale" parce qu'elle a mis aux prises les principales puissances européennes, non pas seulement en Europe, mais sur tous les continents : Amérique du Nord, Antilles, Amérique latine, Indes, Philippines.
Ce traité sanctionne la disparition du premier empire colonial français. Déjà le traité d'Utrecht (11 avril 1713), mettant fin à la guerre de Succession d'Espagne, avait imposé à la France la cession à l'Angleterre de la baie d'Hudson et territoires attenants, de l'Acadie et de Terre-Neuve, réserve faite de droits de pêche.
Cinquante ans plus tard, c'est l'abandon complet. Le roi de France cède "en toute propriété" le Canada avec toutes ses dépendances et toute la partie du continent jusqu'à la rive gauche du Mississippi, tandis que la partie délimitée par la rive droite du fleuve - la Louisiane à proprement parler, est cédée à l'Espagne en échange de la rétrocession de la Floride à l'Angleterre.
La France ne conserve que les îles de Saint-Pierre et de Miquelon au large de Terre-Neuve, avec les droits de pêche.
Dans les Antilles, l'Angleterre restitue la Guadeloupe, la Marie-Galante, la Désirade et la Martinique, ainsi que Sainte-Lucie.
En Afrique, la France cède le Sénégal, y compris Saint-Louis, à l'exception de l'île de Gorée.
Elle cède la totalité de l'Inde à l'exception des comptoirs de Chandernagor, Pondichéry, Yanaon, Karikal et Mahé.
Les stipulations du traité sont les conséquences des réalités. Même si la guerre européenne, c'est-à-dire en Allemagne, n'a pas été aussi désastreuse qu'on l'a dit - en dépit du désastre initial de Rossbach en 1757, Frédéric II a été plus souvent vaincu que vainqueur - pertes et gains s'équilibrent de part et d'autre : mais tous les belligérants sont épuisés...et à court d'argent.
En revanche la France, en dépit de beaux faits d'armes a été vaincue en Amérique : défaite des Plaines d'Abraham (13 septembre 1759), capitulation de Montréal (8 septembre 1760). Les deux flottes françaises ayant été anéanties en 1759, la Nouvelle-France ne pouvait plus être secourue, puisque l'Angleterre avait désormais l'empire des mers.
Même chose en Inde, après le rappel de Dupleix et à cause des erreurs du malheureux Lally-Tollendal. La France n'y conserve plus que les comptoirs de Chandernagor, Pondichéry, Yanaon, Karikal et Mahé, déjà nommés.
Qu'en conclure ? On a beaucoup incriminé le duc de Choiseul, premier ministre de facto, que pourtant le Grand Frédéric, dans ses mémoires, a comparé à Richelieu. Choiseul a plutôt été un Bismarck, inspiré par la RealPolitik, ou à un de Gaulle par rapport à l'Algérie. ll a très vite compris que l'Amérique était devenue indéfendable. Il s'est donc consacré à conserver l'essentiel : les Antilles, qui avec le sucre de canne, cultivé par des esclaves noirs, rapportait gros aux planteurs, alors que le Canada coûtait plus qu'il ne rapportait. Et l'île de Gorée : point de départ du commerce du" bois d'ébène" , c'est-à-dire de la traite des noirs.
Et il s'est consacré avec énergie au redressement du royaume pour préparer la revanche contre le véritable ennemi, l'Angleterre : reconstitution de la flotte, qui, 15 ans plus tard, dépassera celle de l'Angleterre, réorganisation complète de l'armée (il était à la fois ministre de la marine, de la guerre et des affaires étrangères) ; le seul domaine où il échoua, vu les oppositions, furent les finances.
Il faisait preuve d'une grande clairvoyance car, dans un mémoire au roi, il prédisait que cette énorme extension du domaine colonial anglais en produirait l'éclatement, et il annonçait la révolte inéluctable des "Treize colonies", c’est-à-dire des futurs Etats-Unis.
Bref, on voit mal comment il aurait pu faire mieux - ou moins mal. A preuve les violentes critiques de Pitt, alors dans l'opposition, qui estimait le traité désastreux pour l'Angleterre.
Alors, il est certain que les Canadiens français, ainsi d'ailleurs que les Amérindiens alliés des Français, se sont sentis abandonnés. Leurs réactions sont vite devenues acrimonieuses, voire vengeresses...Et il en subsiste quelque chose de nos jours...Tout comme celles des pieds-noirs, et pour les mêmes raisons. On les comprend !
Mais l'idéalisme, en politique, ne réussit pour ainsi dire jamais. Cela s'est produit, cas unique, avec de Gaulle en 1940 ; cela ne s'est plus reproduit avec de Gaulle en 1958.
Le temps est largement venu pour que les Canadiens français, et singulièrement les Québécois, reprennent en main leur destin, comme le général de Gaulle les y a incités le 24 juillet 1967 !
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